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cousine, qui pâlissait et dont les yeux étaient à demi fermés. À cette vue, la frayeur du jeune homme fut grande, mais de peu de durée, car il s’aperçut bientôt que le teint et les yeux de sa cousine reprenaient leur éclat. Cependant cette scène inopinée apporta quelque désordre dans la toilette de la malade. Vainement essaya-t-elle deux ou trois fois de débarrasser son visage de ses grands cheveux noirs que son peigne avait abandonnés. Force lui fut d’avoir recours à son cousin pour remettre l’ordre dans sa chevelure. Cet échange de secours donnés et reçus, joint à la maladresse avec laquelle Ernest remplissait pour la première fois les fonctions de coiffeur, tout cela faillit faire perdre à mademoiselle de Liron l’air sérieux que sa position lui faisait une loi de conserver.

— Asseyez-vous, dit-elle à son cousin d’un ton bref, et laissez-moi faire.

Elle rajusta vivement ses cheveux tant bien que mal, et se tourna vers lui pour l’interroger.

— Je ne vous demanderai pas comment vous êtes venu ici, monsieur, lui dit-elle, mais pourquoi vous y êtes et de quelle manière vous avez imaginé d’en sortir : dites-le-moi, avez-vous réfléchi à tout cela ?

Ernest, sans lever les yeux, fit un signe négatif.

— Vous conviendrez donc qu’il est bien malheureux pour moi de me trouver à la merci d’un étourdi de votre espèce ?

Ernest avoua la justesse de cette observation par un autre mouvement affirmatif.

— Mais répondez au moins à ce que l’on vous demande, poursuivit Justine ; avez-vous perdu l’usage de la parole ? Eh bien ! qu’avez-vous ?... pourquoi pleurer et me regarder ainsi ? Ernest, au nom du ciel, répondez-moi !

Mais il ne répondait rien, et après avoir pris une main de sa cousine, il resta comme en extase à considérer toute sa personne.

La vérité est que mademoiselle de Liron, qui n’y pensait guère en ce moment, vêtue d’une robe blanche, les cheveux épars et laissant éclater dans ses yeux toute la vivacité des émotions qu’elle éprouvait, brillait alors d’une admirable beauté. Le pauvre Ernest ne s’en aperçut que trop ; aussi,