Page:Delille - L Homme des champs 1800.djvu/112

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Vous font chaque printemps leur visite annuelle :
Là, mêlant leur gaîté, leur plainte mutuelle,
Viennent de tous côtés, exacts au rendez-vous,
Des vieillards éclopés, un jeune essaim de foux.
Dans le même salon là viennent se confondre
La belle vaporeuse et le triste hypocondre :
Lise y vient de son teint rafraîchir les couleurs ;
Le guerrier, de sa plaie adoucir les douleurs ;
Le gourmand, de sa table expier les délices.
Au dieu de la santé tous font leurs sacrifices.
Tous, lassant de leurs maux valets, amis, voisins,
Veulent être guéris, mais surtout être plaints.
Le matin voit errer l’essaim mélancolique ;
Le soir, le jeu, le bal, les festins, la musique,
Mêlent à mille maux mille plaisirs divers :
On croit voir l’Elysée au milieu des enfers.
Mais laissant là la foule et ses bruyantes scènes,
Reprenons notre course autour de vos domaines,
Et du palais magique où se rendent les eaux
Ensemble remontons aux lieux de leurs berceaux,
Vers ces monts, de vos champs dominateurs antiques.
Quels sublimes aspects, quels tableaux romantiques !
Sur ces vastes rochers, confusément épars,
Je crois voir le génie appeler tous les arts.
Le peintre y vient chercher, sous des teintes sans nombre,
Les jets de la lumière et les masses de l’ombre :