Page:Delille - L Homme des champs 1800.djvu/131

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Jusque dans ses horreurs la nature intéresse.
Nature, ô séduisante et sublime déesse,
Que tes traits sont divers ! Tu fais naître dans moi
Ou les plus doux transports, ou le plus saint effroi.
Tantôt, dans nos vallons, jeune, fraîche et brillante,
Tu marches, et, des plis de ta robe flottante
Secouant la rosée et versant les couleurs,
Tes mains sèment les fruits, la verdure et les fleurs :
Les rayons d’un beau jour naissent de ton sourire ;
De ton souffle léger s’exhale le zéphire ;
Et le doux bruit des eaux, le doux concert des bois,
Sont les accens divers de ta brillante voix.
Tantôt, dans les déserts, divinité terrible,
Sur des sommets glacés plaçant ton trône horrible,
Le front ceint de vieux pins s’entrechoquant dans l’air,
Des torrens écumeux battent tes flancs ; l’éclair
Sort de tes yeux ; ta voix est la foudre qui gronde
Et du bruit des volcans épouvante le monde.
Oh ! Qui pourra saisir dans leur variété
De tes riches aspects la changeante beauté ?
Qui peindra d’un ton vrai tes ouvrages sublimes,
Depuis les monts altiers jusqu’aux profonds abymes ;
Depuis ces bois pompeux dans les airs égarés,
Jusqu’à la violette, humble amante des prés ?
Quelquefois, oubliant nos simples paysages,
Cherchez sous d’autres cieux de plus grandes images :