Page:Delluc - Monsieur de Berlin, 1916.djvu/104

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j’ai au front un instrument de torture implacable qui me pénètre obstinément le crâne.

Des pendules sonnent. Des horloges sonnent. L’heure, la nuit, la paix. Il fait profondément paisible. Tout cela est plein de lâchetés et de mensonges et je suis absolument seul au milieu d’un chaos de haines irrémédiables. Je suis las de me colleter avec toutes ces ombres.

Est-ce que toute ma vie va se passer à cela ? Mais elle est bientôt passée peut-être et je n’ai rien fait.

Il y a tant de gens à punir…

L’aube. Des oiseaux. Loin de ma fenêtre, un soldat vient d’être relevé. Également, le factionnaire de ma porte. Comme je suis gardé ! Comme je suis perdu !

Je ne dormirai pas. J’ouvre ma fenêtre… Ça sent l’été et l’herbe humide. Ah ! je respire, mais je suis brisé, brisé, brisé.

Un brouillard tout à coup. J’ai failli tomber. Je me jette sur mon lit. Je dors. Je dors. Combien de temps ?

Je suis réveillé ; il y a quelqu’un là. Il est tard et j’avais commandé qu’on me réveille. Il y a là un officier, un valet de chambre et Heimann. C’est lui qui me réveille. Il a une bonne figure ; brave, bon Heimann…

Ses lèvres remuent et je n’entends pas ce qu’il