Page:Delluc - Monsieur de Berlin, 1916.djvu/51

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sans désirs. Qu’est-ce que je fais là ? Je crois bien que je ne tiens à rien. Qui m’intéressera à quoi que ce soit ?

Ces deux médecins qui viennent tous les jours sont des imbéciles.

Et puis je n’en suis pas sûr. Mais ils ont un aspect désagréable, l’un est trop vieux, l’autre est sentimental. Je suis sûr qu’il est sentimental. Et je n’aime plus ça du tout.

J’ai horreur d’avoir près de moi un médecin sentimental. Je lui dirai de ne plus revenir. Il me fatigue les nerfs.

J’aurais peut-être du plaisir à chasser.

Seulement, j’aimerais être seul sans ces invités prétentieux, sans même ce laquais qui tient mon fusil. Être seul dans une forêt, une belle forêt, lourde de silence et sentant la terre à pleine brise, tout seul, et tuer des bêtes, des bêtes qu’on n’amène pas, qui passent, qui passeraient par troupes…

Oui. Eh bien, où cela ? Où la forêt, la brise, et tout le reste ? Et puis les bêtes ne passeraient pas !

Peut-on nommer cela de l’ennui ? Ce n’est pas de l’ennui, mais tout plutôt que ce mot… ce mot… Il y a eu quelques esprits désordonnés dans ma famille, paraît-il. Et après ?

J’assisterai demain à une revue. Et j’irai dans quatre jours aux régates de Kiel.