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Les Goncourt, quand ils se mirent à l’étude du dix-huitième siècle qu’ils parcouraient d’une vue d’ensemble en commençant, sentirent très vivement que ce n’était plus seulement une histoire de Louis XIV décrépit, du Régent, de Louis XV et de Louis XVI qu’il était intéressant de réécrire, mais l’histoire des différentes classes du peuple. Et ils conçurent le projet de la diviser en quatre parties comprenant successivement l’Homme, la Femme, l’État et Paris. Trois de ces grands sujets n’ont pas été traités par eux. Ils ont écrit seulement la Femme.

Remettant à leur plan les documents déjà exploités et publiés sur lesquels s’échafaudent et se copient presque toutes les histoires qui se succèdent, les livres faits avec d’autres livres, ils donnèrent le pas sur tout cela à l’inexploré et à l’inédit. Ils ont fait la chasse aux petites choses qui marquent le battement de pouls d’un instant, aux mémoires, aux autographes, aux pamphlets, aux plaquettes de toute provenance, aux almanachs, aux dessins, reliques muettes ou feuilles légères que la vie livre au vent, comme un duvet arraché de son aile, au fur et à mesure qu’elle vole. À tous les échelons de la société, il s’agissait d’étudier et de fixer les images fugitives des femmes ayant, à la vérité, des traits communs, mais différant entre elles par des nuances infinies ; de suivre les modifications que l’exemple, les influences ambiantes n’ont pas pu manquer d’apporter dans les croyances, dans la façon de comprendre l’éducation, les devoirs du mariage, même dans les toilettes, dans la vie matérielle, enfin dans tout le branchage des idées qui forment l’ossature de la vie d’un peuple. On voit que le sujet ainsi compris était très vaste : aussi les auteurs ont-ils cru devoir le circonscrire et je crois qu’ils