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chal, de sa préface et du Théâtre de mon temps », par Pipe-en-bois.

Hélas ! il ne pensait pas grand’chose le Pipe-en-bois apocryphe qui ne se soucie pas, même maintenant, de réclamer l’honneur de cette plaquette fade, improvisée dans une nuit. Il est maintenant un admirateur de l’œuvre des Goncourt. Lui-même, sans se nommer, a raconté la naissance de son factum. Le 12 décembre 1865, Nadar avait à sa table quelques amis dont étaient Préault, Asselineau, et un tout jeune homme qui avait grand désir de jeter aux orties sa besogne administrative et de faire de l’esbroufe dans la mêlée littéraire. On parla avec animation de la grande affaire du jour. Nadar eut l’idée d’un pendant aux Propos de Labienus et au Droit au vol, et dit qu’une brochure signée Pipe-en-bois aurait sûrement un gros succès. M. Iveling Rambaud se saisit de l’idée que Nadar lui abandonna volontiers, et, le soir même, Nadar emmena le jeune homme chez un éditeur, nommé Julien Lemer, auquel il exposa le projet. L’affaire fut conclue à la condition expresse que la copie serait fournie le lendemain même, pour que la brochure pût être lancée le surlendemain, à l’heure où la Librairie internationale mettrait en vente la pièce des Goncourt. On tirerait le pamphlet sur même papier qu’elle, avec couverture pareille et même format.

Le jeune homme, rentré chez lui, improvisa, au courant de la plume, le réquisitoire mièvre et sans vigueur d’où nous extrayons ces lignes : « Votre pièce est immorale de toutes les façons ; pas un caractère, pas une individualité sur laquelle on puisse reposer son esprit. J’y vois Maréchal, un idiot ; Mme Maréchal, une gueuse ; Paul, un gamin ; son frère un monsieur qui ne croit à rien et qui n’a même pas l’esprit de son rôle ;