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de Goncourt le retour immédiat dans la maison d’Auteuil et l’entraîna chez lui, à Bar-sur-Seine.

Dans le premier moment de stupeur, en recevant le billet navrant qu’on a lu plus haut, M. Burty, pour apprendre la nouvelle aux lecteurs du Rappel, avait publié simplement les quelques lignes tout intimes qu’il avait dans les mains. M. E. de Goncourt en fut d’abord contrarié :

Bar-sur-Seine, 28 juin 1870.
Mon cher Burty,

Je vous écris pour que vous ne pensiez pas que je garde le moindre sentiment de fâcherie de la publication de la lettre. Je vous sais trop mon ami pour n’être pas persuadé que vous seriez désolé de faire la moindre chose qui pût m’être désagréable. J’aurais mieux aimé que ce mot qui avait, hélas ! le dramatique d’une terrible émotion, ne fût pas livré au public, mais les gens qui me connaissent savent, je crois, assez combien ma douleur est profonde et sincère pour chercher à l’ébruiter dans un journal…

Connaissez-vous un peu intimement Lalanne ? Je voudrais qu’il me fît un dessin, un fusain, du fond de mon jardin, de ce coin que ses derniers jours affectionnaient et où le mourant promenait ses tristes regards sur les grands arbres habillés de lierre, les iris, le petit rocher, le dauphin de porcelaine de Saxe… Vous concevez que j’abandonne la maison charmante et maudite.

Je vous embrasse, mon ami. Présentez mes tristes amitiés à votre femme.

E. de Goncourt.

Victor Hugo, quand il apprit la mort de Jules, s’empressa d’écrire à Edmond :

H. House, 25 juin 1870.
Monsieur et cher confrère,

Pourquoi vous écrire ? — Pour vous dire qu’on souffre avec vous, car, au delà de ce partage de la douleur, il n’y a rien de possible et toute consolation échoue. Vous avez perdu votre compagnon dans la vie, votre soutien dans cette charge pesante