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notés, qu’il valait mieux, pour eux, s’occuper moins de journalisme ; et les jeunes gens, les ailes repliées et impatientes, ressassèrent, dans leur esprit, le projet de s’exiler en Belgique et d’y fonder un journal libre qu’ils appelleraient le Pamphlet.

Ils continuèrent pourtant à collaborer au Paris, mais sans y prendre plaisir. Ils n’étaient pas de ceux qui s’accommodent des œillères et qui coupent les ongles facilement à leurs idées et à leurs phrases. Aussi, dirigeant heureusement leurs forces d’un autre côté, sentant monter chaque jour, autour d’eux, le goût de l’histoire et des documents inédits, ils se préparèrent des travaux plus sérieux et, le 27 avril 1853, après un article sur Édouard Ourliac, ils tirèrent leur révérence au public dans le court entrefilet que voici : « Sur ce, lecteur, adieu ! Voilà six mois que, tous les mercredis, nous te prenons le bras et causons avec toi. Un livre d’historiques biographies nous réclame tout entiers et, au point où nous en sommes ensemble, je ne vois pas raison à te cacher son titre ; cela s’appellera, quand ce sera fini : les Maîtresses de Louis XV. Nous avons fait le premier article du journal Paris, nous n’en faisons pas le dernier. C’est tant mieux. Lecteur, si tu nous as écoutés tous les mercredis, merci. Si tu as bâillé, pardonne-nous comme nous te pardonnons. »

Et leurs adieux à la rédaction furent marqués par un fort souper qui dura jusqu’à six heures du matin. Gaiffe, un des convives, rentrant chez lui, fort pâle sans doute, fut rencontré dans l’escalier par son concierge qui crut qu’il allait se battre en duel et le supplia de n’en rien faire !

Le Paris ne survécut pas longtemps à la retraite des Goncourt. Un ukase impérial le supprima et l’Éclair fut entraîné avec lui.