Page:Depasse - Henri Martin, 1883.djvu/11

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lui-même ces degrés où s’épanouissent tant de vanités obscures et de fatuités vides.

Mais dans un petit cercle d’hommes sages et qu’il aime, quel autre homme tout à coup ! Sa conversation devient intarissable. Il parle avec une bonté, une douceur, une animation tempérée et charmante. Il ne tient pas à la galerie, il ne parle que pour la vérité, pour le droit, et pour ouvrir un libre cours à toutes les nobles pensées et à tous les sentiments généreux qu’il contient si naturellement en lui-même.

Si vous avez le bonheur de lui avoir inspiré de l’estime et de l’amitié, il vous arrête au passage, n’importe où, dans la rue, au coin d’un pont, sur le chemin qui mène à la Chambre ou à l’Académie, et là il vous instruit de l’état passé et présent des affaires du monde avec une science qui embrasse toutes choses. Il est tout à votre portée, d’une complaisance infatigable, familier, doux, bienveillant, pris d’un soudain frémissement, dès qu’il s’agit de la patrie. Son teint s’allume, ses joues se couvrent d’une rougeur éloquente entre les deux franges hérissées de ses favoris blancs. Il vous écoute, il vous répond, il vous invite à l’interroger, il prend un plaisir visible à vous communiquer le fruit