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BETTY PETITE FILLE

Ainsi pompeusement parée, la fille ne pouvait se résoudre à terminer sa toilette. Elle errait par l’appartement, se mirant aux glaces, retroussant la combinaison pour mieux contempler le pantalon ; écartant ce dernier pour palper la chemise.

Elle étudiait les ondulations de sa croupe charnue qui tendait l’étoffe et s’essayait aux ronds de jambes qu’elle croyait de bon ton.

Betty la suivait et conseillait. Ses avis toujours étaient frappés au coin de la science de la coquetterie et la goton écoutait avec un grand sérieux.

Aussi le déjeuner ce matin-là fut-il détestable ; la viande était brûlée et les légumes coriaces.

Madame Cérisy pleine d’indulgence fut doucement pitoyable à cette pauvre Léontine qui décidément ne se dégourdissait pas rapidement.

Elle ignorait évidemment qu’elle se rendait l’après-midi à une fête intime susceptible de changer la direction de ses aspirations. L’aurait elle su que peut-être elle lui aurait proposé de prendre sa place. Peut-être aussi l’aurait-elle approuvée, chacun étant un peu comme le renard ayant eu la queue malencontreusement coupée.

Betty tremblait d’une impatience enfiévrée qui lui coupait l’appétit :

— C’est la croissance ! se disait sa mère en souriant.