Page:Desbordes-Valmore - Poésies, 1822.pdf/125

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée
113
ÉLÉGIES

ÉLÉGIES.
Il parlait, et ma vie était près de s’éteindre.
L’étonnement, l’effroi, ce doux effroi du cœur,
M’enchaînait devant lui. Je l’écoutais se plaindre,
Et, mourante pour lui, je plaignais mon vainqueur.
Il parlait, il rendait la nature attentive,
Tout se taisait. Des vents l’haleine était captive ;
Du rossignol ému le chant semblait mourir :
On eût dit que l’eau même oubliait de courir.
Hélas ! qu’avait-il fait alors pour me déplaire ?
Il gémissait, me cherchait comme toi.
Non, je n’avais plus de colère,
Il n’était plus coupable, il était devant moi.
Sais-tu ce qu’il m’a dit ? des reproches….. des larmes…..
Il sait pleurer, ma sœur !
O Dieu ! que sur son front la tristesse a de charmes !
Que j’aimais de ses yeux la brûlante douceur !
Sa plainte m’accusait ; le crime….. je l’ignore :
J’ai fait pour l’expliquer des efforts superflus.
Ces mots seuls m’ont frappée, il me les crie encore :
« Je ne te verrai plus !
Et je l’ai laissé fuir, et ma langue glacée
A murmuré son nom qu’il n’a pas entendu ;
Et sans saisir sa main ma main s’est avancée,
Et mon dernier adieu dans les airs s’est perdu.
113

Slad