Page:Descartes - Œuvres, éd. Adam et Tannery, I.djvu/674

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ſuadé qu’ils pouroient ſuffire, pour faire que ceux qui les auront ſoigneuſement examinez, & conſerez auec ce qui a eſté cy-deuant écrit des meſmes matieres, iugent que ie me ſers de quelqu’autre methode que le commun, & qu’elle n’eſt peut-eſtre pas des plus 5 mauuaiſes.

Il eſt vray que i’ay eſté trop obſcur en ce que i’ay écrit de l’exiſtence de Dieu dans ce traité de la Methode, & bien que ce ſoit la piece la plus importante, i’auouë que c’eſt la moins élabourée de tout 10l’ouurage ; ce qui vient en partie de ce que ie ne me ſuis reſolu de l’y ioindre que ſur la fin, & lors que le Libraire me preſſoit. Mais la principale cauſe de ſon obſcurité vient de ce que ie n’ay oſé m’étendre ſur les raiſons des ſceptiques, ny dire toutes les choſes qui 15 ſont neceſſaires ad abducendam mentem à ſenſibus : car il n’eſt pas poſſible de bien connoiſtre la certitude & l’euidence des rai|ſons qui prouuent l’exiſtence de Dieu ſelon ma façon, qu’en ſe ſouuenant diſtinctement de celles qui nous font remarquer de l’incertitude 20en toutes les connoiſſances que nous auons des choſes materielles ; & ces penſées ne m’ont pas ſemblé eſtre propres à mettre dans vn liure, où i’ay voulu que les femmes meſmes puſſent entendre quelque choſe, & cependant que les plus ſubtils 25 trouuaſſent auſſi aſſez de matière pour occuper leur attention. I’auouë auſſi que cette obſcurité vient en partie, comme vous auez fort bien remarqué, de ce que i’ay ſupoſé que certaines notions, que l’habitude de penſer m’a rendu familieres & euidentes, le deuoient eſtre 30 auſſi à vn chacun ; comme par exemple, que nos idées