1.5.3-514- CCCXLVII. — 2 Mai 1644. 117
Pour les animaux fans raifon, il eft éuident qu'ils
ne font pas libres, à caufe qu'ils n'ont pas cette
puiflance pofitiue de fe déterminer; mais c'eft en
eux vne pure négation, de n'eftre pas forcez ny
5 contraints.
Rien ne m'a empefché de parler de la liberté que nous auons à fuiure le bien ou le mal, finon que i'ay voulu éuiter, autant que i'ay pu, les controuerfes de la Théologie, & me tenir dans les bornes de la Philo-
10 fophie naturelle. Mais ie vous auoùe qu'en tout ce où il y a occafion de pécher, il y a de l'indifférence ; & ie ne croy point que, pour mal faire, il foit befoin de voir clairement que ce que nous fefons eft mau- uais ; il fuffit de le voir confufement, ou feulement de
i5 fe fouuenir qu'on a iugé autrefois que cela l'eftoit, fans le voir en aucune façon, c'eft à dire, fans auoir attention aux raifons qui le prouuent ; car, fi nous le voyons clairement, il nous feroit 3 impoffible de pé- cher, pendant le temps que nous le ver rions en cette
ao forte ; c'eft pourquoy on dit que omnis peccans ejl îgno- rans. Et on ne laiffe pas de mériter, bien que, voyant tres-clairement ce qu'il faut faire, on le faffe infailli- blement, & fans aucune indifférence, comme a fait Iefus-Chrift en cette vie. Car l'homme pouuant n'auoir
2 5 pas toufiours vne parfaite attention aux chofes qu'il doit faire, c'eft vne bonne adion que de l'auoir, & de faire, par fon moyen, que noftre volonté fuiue fi fort la lumière de noftre entendement, qu'elle ne foit point du tout indifférente. Au refte, ie n'ay point écrit
îo que la grâce empefchaft entièrement l'indifférence;
a. Moralement parlant [Inst.].
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