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ET DES CATARACTES.

naviguer l’esquif très-loin du lieu où il est tombé, comme si on l’eût lancé jusque-là par une machine de guerre[1] » Dans une de ses épîtres, Sénèque dit encore que les gens d’une certaine peuplade, ne pouvant soutenir le bruit de la chute du Nil, transportèrent leur ville dans un autre lieu[2].

Il n’est pas douteux que le théâtre de cette description ne soit à Chellâl ; mais Sénèque, pour la rendre plus frappante, n’a-t-il pas réuni des traits appartenant à différentes chutes du Nil ? Que les hommes du pays donnassent un spectacle en traversant la dernière cataracte, c’est ce qui est très-croyable, et c’est ce que racontent Strabon et Aristide, qui ont voyagé sur les lieux ; mais le bruit intolérable et la hauteur immense de la chute s’appliquent beaucoup mieux aux autres cataractes.

La description que fait Pline du cours du Nil à sa sortie de l’Éthiopie, s’applique également à la cataracte de Syène. « Le fleuve est embarrassé dans des îles qui, semblables à autant d’aiguillons, irritent sa violence ; ensuite, renfermé entre des montagnes, il roule comme un torrent, et se porte, avec une rapidité toujours croissante, vers un lieu d’Éthiopie appelé Catadupes, où se trouve la dernière cataracte ; et là, entre les rochers qui l’arrêtent, il se précipite plutôt qu’il ne coule, avec un immense fracas[3]. » Je ne parle point ici de Solin, qui a copié Pline presque textuellement[4] : il en est à peu

  1. Senec. Natural. Quæst. l. IV, c. 2.
  2. Senec. epist. 56.
  3. Plin. Hist. nat. l. V, c. 9.
  4. Solin. Polyhistor. cap. 35.