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CH. III, DESCRIPTION

duit beaucoup de noms égyptiens, auront laissé le nom antique à celle de ces îles qui était, à deux lieues de Syène, la plus célèbre par ses monumens et par son culte ; et pour distinguer l’île en face de Syène, ils auront traduit en grec son nom générique.

Cette opinion prend beaucoup de force par la lumière qu’elle jette sur plusieurs circonstances géographiques, dont jusqu’ici l’on n’a pu rendre compte. Comment se fait-il qu’Hérodote, le plus ancien auteur qui ait parlé d’Éléphantine, n’ait pas même nommé l’île de Philæ ? Est-il croyable qu’on lui ait laissé ignorer entièrement un lieu si important dans l’histoire sacrée de l’Égypte[1] ? Il y a plus : ce qu’il dit d’Éléphantine au chapitre 28 d’Euterpe ne peut s’expliquer en aucune façon, si l’on entend l’île en face de Syène, et ne prend un sens plausible qu’en l’appliquant à Philæ. Ces profonds abîmes et ces tourbillons du Nil, qu’il décrit entre Syène et Éléphantine, doivent s’entendre des cataractes situées entre Syène et Philæ, ainsi qu’on peut le voir dans la description précédente[2] ; je ne parle pas ici des prétendues sources du Nil, situées au même lieu, selon le récit que lui en faisait le prêtre de Saïs, et qui ont fourni matière à la critique du rhéteur Aristide[3] : mais le fond du passage confirme très-bien cette idée, qu’Hérodote parlait de Philæ sous le nom d’Éléphantine. Cet historien

    là que l’Égypte commence ; mais je vois ce même mot de πύλαι employé dans la géographie sans aucune altération, au livre IV de la Géographie de Ptolémée, chap.  VIII : ce nom y est donné à des montagnes de l’Éthiopie supérieure. En second lieu, l’orthographe de Φίλαι s’oppose à cette étymologie.

  1. Voyez surtout Diodore de Sicile, l. I, sect. I, 12.
  2. Voyez ci-dessus, chapitre II, section II.
  3. Voyez ibid.