Page:Destutt de Tracy - Élémens d’idéologie, première partie.djvu/456

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Les écritures alphabétiques et syllabiques ne sont point des langues ; elles ne représentent point immédiatement les idées ; elles représentent les sons d’une langue parlée ; elles rendent visuels des signes oraux, et rien de plus.

Lire celles-ci, ce n’est que les prononcer ; lire les premières, c’est les traduire.

Un alphabet unique, une orthographe unique, une langue parlée unique, seraient suffisans et plus commodes ; mais eussions-nous une langue parlée universelle, les langues arithmétique et algébrique auraient encore des avantages particuliers qui devraient les faire conserver, ainsi que les plans et les figures de géométrie, parce qu’elles n’ont plus ces avantages quand elles sont traduites dans une autre langue quelconque.

Tous nos systèmes de signes, tous nos langages, sont presqu’entièrement de convention, pour peu qu’ils soient perfectionnés ; mais ils ont tous pour base commune les actions que nous font faire nécessairement nos pensées, et qui, par cela même, les manifestent et en sont les signes naturels.

Le langage d’action est donc le langage originaire ; il est composé de gestes, de cris, d’attouchemens ; il s’adresse à la vue, à l’ouïe, au tact.

Dans nos langages perfectionnés, nous employons toujours plus ou moins ces trois moyens, quoique celui qui s’adresse à l’ouïe soit prédominant de beaucoup, excepté dans les momens où la violence de la passion nous donne le besoin de produire un effet subit, et nous ôte la capacité de faire des combinaisons réfléchies.

Mais l’effet de tous ces signes n’est pas seulement