Page:Destutt de Tracy - Élémens d’idéologie, seconde partie.djvu/295

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peu abstrait, et a exigé beaucoup d’attention, parce qu’il est assez difficile de se bien transporter dans une situation dans laquelle on n’a jamais été ; délassons-nous actuellement à voir les conséquences qui résultent de ces faits. Il me paraît que les voici.

D’abord, il est certain que si les hommes ne peuvent presque pas penser, sans avoir converti quelques-uns de leurs signes naturels en signes artificiels, ils ne peuvent non plus faire presqu’aucuns progrès sans avoir trouvé un moyen quelconque de rendre durables ces signes artificiels primitifs, qui sont tous passagers et fugitifs.

Secondement, il n’est pas moins sûr que quand, pour son malheur, un peuple a pris le parti de fixer ces signes transitoires, au moyen d’une seconde langue représentant directement les mêmes idées d’une autre manière, il doit arriver : 1) que la presque totalité de la nation demeure inévitablement incapable d’apprendre cette seconde langue, et par conséquent absolument privée de l’usage de tout signe durable, et de la possibilité d’acquérir les connaissances les plus simples.

2) que le très-petit nombre de gens qui