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quiétudes de M. Georges était que nous pussions le croire coupable ; qu’il l’avait chargé de nous affirmer son innocence de la manière la plus solennelle. M. Woodcourt n’était parvenu à calmer ce pauvre homme qu’en lui donnant l’assurance qu’il s’acquitterait de sa commission, dès qu’il lui serait possible de se présenter chez nous. Il ajouta qu’il nous quittait pour aller voir le prisonnier ; mon tuteur répondit qu’il irait avec lui ; et n’ayant pas même essayé de me contredire lorsque je demandai à les accompagner, nous partîmes tous les trois pour la maison d’arrêt.

C’était une grande prison avec maintes et maintes cours, de nombreux corridors, comme tous les édifices du même genre, et des pavés et des murailles tellement uniformes, qu’il me fut aisé de comprendre la passion qu’inspira parfois un brin d’herbe à de pauvres prisonniers enfermés dans de pareils murs. Le maître d’armes occupait une cellule particulière et s’était levé quand il avait entendu le bruit des clefs et des verrous ; il fit quelques pas vers la porte en nous voyant entrer, et nous salua froidement ; je lui tendis la main, il comprit notre pensée, respira largement, et nous faisant cette fois un salut cordial : « Vous m’ôtez de l’esprit un grand poids, nous dit-il ; et maintenant je me soucie peu de savoir comment cela finira. C’est un endroit moins convenable encore pour recevoir une dame, que ma galerie de tir ; mais je connais miss Summerson, et je sais qu’elle n’y fera pas attention. »

Il m’offrit la main pour me conduire près du banc de bois qui était au fond de la cellule, et parut très-satisfait lorsque j’y fus assise. « Merci ! dit-il, mademoiselle. »

« Georges, lui dit mon tuteur, de même que nous n’avons pas besoin que vous nous affirmiez votre innocence, j’espère qu’il est inutile de vous assurer de la foi pleine et entière que nous y ajoutons.

— Certainement, monsieur Jarndyce, et je vous remercie de tout mon cœur ; si j’étais coupable, il me serait impossible de vous regarder sans vous avouer mon crime après la démarche que vous voulez bien faire et dont je suis profondément touché ; profondément, je vous assure ; je ne sais pas m’exprimer comme je le voudrais ; mais je suis on ne peut plus sensible à votre visite, ajouta-t-il en posant la main sur sa poitrine avec un geste rempli d’éloquence.

— Voyons d’abord, reprit mon tuteur, si nous pouvons rendre votre position plus confortable.

— Je ne vous comprends pas, monsieur !