Page:Dickens - David Copperfield, Hachette, 1894, tome 1.djvu/380

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d’un marchand des quatre saisons, qui rappela à ma tante de douloureux souvenirs. Une fois en sûreté chez nous, nous eûmes encore une longue conversation sur mes projets d’avenir, et comme je savais qu’elle était pressée de retourner chez elle, et qu’entre le feu, les comestibles et les voleurs, elle ne passait pas agréablement une demi-heure à Londres, je lui demandai de ne pas s’inquiéter de moi, et de me laisser me tirer d’affaire tout seul.

« Ne croyez pas que je sois à Londres depuis huit jours, mon cher enfant, sans y avoir songé, répliqua-t-elle ; il y a un petit appartement meublé à louer dans Adelphi, qui doit vous convenir à merveille. »

Après cette courte préface, elle tira de sa poche une annonce soigneusement découpée dans un journal, et qui déclarait qu’il y avait à louer dans Buckingham-Street, Adelphi, un joli petit appartement de garçon meublé, avec vue sur la rivière, fraîchement décoré, particulièrement propre à servir de résidence pour un jeune gentleman, membre de l’une des corporations légales, ou autre, pour entrer immédiatement en jouissance. Prix modéré ; on pouvait le louer au mois.

« Mais, c’est justement ce qu’il me faut, ma tante, dis-je en rougissant de plaisir à la seule idée d’avoir un appartement à moi.

— Alors, venez, dit ma tante en remettant à l’instant le chapeau qu’elle venait d’ôter. Allons voir. »

Nous partîmes. L’écriteau annonçait qu’il fallait s’adresser à mistress Crupp, et nous tirâmes la sonnette de la porte de service que nous supposions communiquer au logis de cette dame. Ce ne fut qu’après avoir sonné deux on trois fois que nous pûmes réussir à persuader à mistress Crupp de communiquer avec nous. Enfin, pourtant, elle arriva sous la forme d’une grosse commère, bourrée d’un jupon de flanelle qui passait sous une robe de nankin.

« Nous voudrions voir l’appartement, s’il vous plaît, madame, dit ma tante.

— Pour monsieur ? dit mistress Crupp en cherchant ses clefs dans sa poche.

— Oui, pour mon neveu, dit ma tante.

— C’est juste son affaire, dit mistress Crupp. »

Et nous montâmes l’escalier.

L’appartement était situé au haut de la maison, grand avantage aux yeux de ma tante, puisqu’il était facile d’arriver