Page:Dickens - David Copperfield, Hachette, 1894, tome 2.djvu/213

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Ce ne fut pas sans étonnement qu’une fois la lune de miel écoulée, et les demoiselles d’honneur rentrées au logis, nous nous retrouvâmes seuls dans notre petite maison, Dora et moi ; désormais destitués pour ainsi dire du charmant et délicieux emploi qui consiste à faire ce qu’on appelle sa cour.

Je trouvais si extraordinaire d’avoir toujours Dora près de moi ; il me semblait si étrange de ne pas avoir à sortir pour aller la voir ; de ne plus avoir à me tourmenter l’esprit à son sujet ; de ne plus avoir à lui écrire, de ne plus me creuser la tête pour chercher quelque occasion d’être seul avec elle ! Parfois le soir, quand je quittais un moment mon travail, et que je la voyais assise en face de moi, je m’appuyais sur le dossier de ma chaise et je me mettais à penser que c’était pourtant bien drôle que nous fussions là, seuls ensemble, comme si c’était la chose du monde la plus naturelle que personne n’eût plus à se mêler de nos affaires que tout le roman de nos fiançailles fut bien loin derrière nous, que nous n’eussions plus qu’à nous plaire mutuellement, qu’à nous plaire toute la vie.

Quand il y avait à la Chambre des communes un débat qui me retenait tard, il me semblait si étrange, en reprenant le chemin du logis, de songer que Dora m’y attendait ! Je trouvais si merveilleux de la voir s’asseoir doucement près de moi pour me tenir compagnie, tandis que je prenais mon souper ! Et de savoir qu’elle mettait des papillottes ! Bien mieux que ça, de les lui voir mettre tous les soirs. N’était-ce pas bien extraordinaire ?

Je crois que deux tout petits oiseaux en auraient su autant sur la tenue d’un ménage, que nous en savions, ma chère petiteDora et moi. Nous avions une servante, et, comme de raison, c’était elle qui tenait notre ménage. Je suis encore intérieurement convaincu que ce devait être une fille de mistress Crupp déguisée. Comme elle nous rendait la vie dure , Marie-Jeanne !