Page:Dickens - L'embranchement de Mugby, 1879.djvu/111

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de notre géant, coupant menue la viande de l’enfant et l’arrosant de jus d’une main égale et libérale, le tout sous la suprême direction de Mlle Polly.

« Et maintenant, fit-elle, sois gentil, et, pendant que nous dînons, raconte-moi l’histoire que je t’ai apprise. »

Tremblant comme s’il passait un examen de licence, Barbox frères fit un piètre début. En effet, non seulement sa mémoire ne lui rappelait que d’une manière très imparfaite l’époque précise à laquelle le pâté faisait sa première apparition dans l’histoire, mais encore il n’était nullement sûr des dimensions exactes de cet indispensable élément du récit. Grâce pourtant aux encouragements qui lui furent donnés, il s’en tira très passablement en vérité, quoiqu’il y eût, il faut l’avouer, un certain manque de souffle dans la manière dont il représentait les joues gonflées du petit garçon et dont il décrivait son appétit. La Fée accusait aussi trop de mansuétude, ce qui tenait sans doute au secret désir du narrateur de l’exonérer un peu ; mais, en dépit de ces petites défaillances, et en faisant la part du premier essai, nécessairement un peu gauche, d’un géant de bonne volonté, cela pouvait passer.

« Je t’ai dit d’être gentil, et tu l’as été, dit Polly. N’est-ce pas que tu es gentil, dis-moi ?

— Je l’espère, » répondit Barbox frères.