Page:Dickens - L'embranchement de Mugby, 1879.djvu/112

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Il se faisait si humble, que Polly, assise sur une chaise à sa droite et fort surélevée par de nombreux coussins, crut devoir l’encourager par une ou deux petites tapes sur la joue, administrées avec le côté graisseux de sa cuillère. Elle alla même jusqu’à vouloir lui donner un baiser ; mais, en se mettant tout debout sur une chaise pour lui offrir cette dernière récompense, elle culbuta en avant au beau milieu des plats, ce qui fit qu’il s’écria en allant à son secours :

« Ô ciel, Polly ! je vous ai crue dans le feu !

— Quel poltron tu fais, n’est-ce pas ? dit la jeune demoiselle, lorsqu’elle se vit réinstallée à sa place.

— Oui, en effet, je suis un peu nerveux. Ah mais ! ne faites pas cela, Polly ! Ne brandissez pas votre cuillère, car vous allez tomber de côté ! Ne remuez donc pas ainsi vos petites jambes quand vous riez, car, bien sûr, vous allez dégringoler en arrière ! Ô ciel, Polly, ma chère Polly ! nous sommes environnés de dangers !!! » s’écriait le malheureux Barbox en proie à une sorte de désespoir.

Et, en réalité, il ne put trouver d’autre préservatif contre tous les abîmes béants qui menaçaient d’engloutir Polly, que l’insidieuse proposition de s’asseoir bien gentiment sur un petit tabouret aussitôt après le dîner. Elle voulut bien y consentir à la condition qu’il ferait de même.