Page:Dickens - L'embranchement de Mugby, 1879.djvu/123

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était compatissant et bon. Ô monsieur Jackson, monsieur Jackson ! Si vous aviez pu voir couler les larmes de soulagement que j’ai versées après vous avoir revu ainsi ! »

À ce moment, sur sa couche lointaine, Phœbé jouait-elle quelque mélodie ? Notre voyageur crut l’entendre.

« Je demandai votre adresse au marchand ; mais on ne put me donner aucune indication. Vous aviez parlé devant moi de reprendre le premier train ; mais vous n’aviez pas dit pour quel endroit. Je résolus donc d’aller à la station à peu près à la même heure, chaque fois que mes leçons me le permettraient, dans l’espoir de vous y rencontrer. Je m’y rendais en effet très souvent, mais sans jamais vous y trouver. Aujourd’hui seulement je vous ai enfin aperçu dans la rue. Vous sembliez méditer profondément en marchant ; mais l’expression calme de votre visage m’enhardit au point que je vous envoyai mon enfant. Lorsque je vous vis pencher la tête vers elle et lui parler avec bonté, je demandai pardon à Dieu de tous les chagrins que je vous avais causés. Maintenant, c’est vous que je supplie de me pardonner ! de pardonner à mon pauvre mari ! J’étais bien jeune, monsieur Jackson, lui aussi, et, avec l’ignorante audace de cette époque de la vie, nous ne nous rendions pas bien compte de ce que nous pouvions faire souffrir à celui qui avait déjà porté le