Page:Dickens - L'embranchement de Mugby, 1879.djvu/52

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Le lampiste, debout et frottant discrètement son gros nez avec un mouchoir si huileux qu’il semblait, dans un accès de distraction, s’être pris pour une des lampes confiées à ses soins, n’avait certainement pas l’air que l’on prête d’ordinaire à messieurs les poètes. C’était un homme à peu près de l’âge de son hôte, maigre, et dont tous les traits étaient bizarrement tirés en haut, comme si la racine de ses cheveux leur servait d’aimant. Son teint était fort luisant, sans doute à cause des nombreuses frictions oléagineuses auxquelles il était soumis, et ses cheveux gris, coupés très courts, se hérissaient sur son front, comme s’ils subissaient à leur tour l’attraction magnétique de quelque invisible agent. Le sommet de sa tête ne ressemblait donc pas mal au lumignon d’un quinquet.

« Mais, vraiment, reprit le voyageur, je vous fais là une impertinente question, et cela ne me regarde en aucune façon. Soyez ce qu’il vous plaira, mon garçon.

— Il y a des gens, monsieur, remarqua le brave lampiste en ayant l’air de s’excuser, il y a des gens qui font quelquefois ce qui ne leur plaît guère.

— Ah ! dit en soupirant l’étranger, personne ne le sait mieux que moi, car j’ai été toute ma vie ce que je n’aimais pas être.