Page:Dickens - Les Papiers posthumes du Pickwick Club, Hachette, 1893, tome 1.djvu/267

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

grand garde-chasse, autrement vous pourriez mettre votre bourre dans votre gilet aussi bien que dans celui des autres. »

M. Tupman, avec l’empressement le plus obligeant, plaça son fusil dans la position requise, et le convoi repartit encore, les deux amateurs marchant avec leur fusil renversé comme une couple de soldats à des funérailles.

Tout d’un coup les chiens s’arrêtèrent, et leurs maîtres en firent autant.

« Qu’est-ce qu’ils ont donc dans les jambes ? demanda M. Winkle. Comme ils ont l’air drôle.

— Chut ! répliqua M. Wardle doucement. Ne voyez-vous pas qu’ils arrêtent !

— Ils s’arrêtent ! répéta M. Winkle en regardant tout autour de lui, comme pour chercher la cause qui avait interrompu leur progrès. Pourquoi s’arrêtent-ils ?

— Attention ! murmura M. Wardle, qui, dans l’intérêt du moment, n’avait pas entendu cette question. Allons maintenant. »

Un violent battement d’ailes se fit entendre si soudainement que M. Winkle en recula comme si lui-même avait été tiré. Pan ! pan ! deux coups de fusil retentirent, et la fumée s’éleva tranquillement dans l’air en décrivant des courbes gracieuses.

« Où sont-elles ? s’écria M. Winkle dans le plus grand enthousiasme et se retournant dans toutes les directions. Où sont-elles ? Dites-moi quand il faudra faire feu ! Où sont-elles ? où sont-elles ?

— Ma foi ! les voilà, dit M. Wardle en ramassant deux perdrix que les chiens avaient déposées à ses pieds.

— Non ! non ! je veux dire les autres ! reprit M. Winkle encore tout effaré.

— Assez loin, à présent, si elles courent toujours, répliqua froidement M. Wardle en rechargeant son fusil.

— J’imagine que nous en trouverons une autre compagnie dans cinq minutes, observa le grand garde-chasse. Si le gentleman commence à tirer maintenant, son plomb sortira peut-être du canon quand nous les ferons lever.

— Ah ! ah ! ah ! fit M. Weller.

— Sam ! dit M. Pickwick, touché de la confusion de son disciple.

— Monsieur ?

— Ne riez pas.