Page:Dickens - Nicolas Nickleby, trad. Lorain, 1885, tome 2.djvu/11

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

maître, suivant avec le tronçon usé et noirci d’une vieille plume une liste de chiffres sur une table d’intérêts affichée contre la muraille. Son attention tout entière à ses calculs semblait détachée de tout autre objet.


CHAPITRE II.

Visite faite à M. Ralph Nickleby par des personnes qui sont déjà de notre connaissance.

« Combien donc de diables d’heures me laissez-vous sonner à cette vieille casserole de sonnette que Dieu confonde, dont un seul frétillement suffit pour faire tomber du haut mal le gaillard le plus robuste, ou que le diable m’emporte ? dit M. Mantalini à Newman Noggs tout en s’essuyant les bottes sur le décrottoir de Ralph Nickleby.

— Je n’avais entendu sonner qu’une fois, répondit Newman.

— Alors il faut que vous soyez le plus immensément et le plus abominablement sourd, dit M. Mantalini, aussi sourd qu’un poteau du diable. »

Pendant ce temps-là, M. Mantalini, qui avait gagné le corridor, se dirigeait sans cérémonie vers la porte du bureau de Ralph quand Newman lui barra le passage en lui disant que M. Nickleby ne voulait pas être dérangé, et finit par lui demander si c’est qu’il avait quelque chose de pressé à lui communiquer.

« Je crois bien ! dit M. Mantalini, diablement pressé ; c’est pour fondre quelques sales chiffons de papier en une coquine de sauce de petite monnaie luisante, brillante, sonnante, retentissante. »

Pendant que Newman annonçait l’objet de sa visite, l’objet lui-même entrait sans façon dans la chambre, et, serrant la main calleuse de Ralph avec une vivacité d’action peu commune, lui jurait ses grands dieux qu’il ne lui avait jamais vu si bonne mine de toute sa vie.

« Il y a toujours un velours de pêche sur votre diable de figure, dit M. Mantalini prenant une chaise sans attendre d’en être prié et s’arrangeant les cheveux et les moustaches ; vous avez un air jeune et gaillard, ou le diable m’emporte !