Page:Dickens - Nicolas Nickleby, trad. Lorain, 1885, tome 2.djvu/133

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comme pour attraper une mouche ; et, en effet, elle saisit avec la plus grande dextérité une des chevilles du vieux gentleman, puis, aussitôt, l’autre main fit son apparition de la même manière et empoigna l’autre cheville.

Le vieux gentleman, ainsi pris au piège, leva une fois ou deux les jambes avec assez de difficulté, comme une mécanique dont les ressorts grossiers sont roides ou rouillés ; puis, regardant au bas du mur dans son jardin, il poussa un grand éclat de rire.

« Ah ! c’est donc vous ? dit le vieux gentleman.

— Oui, c’est moi ! répliqua une voix rude.

— Et comment va l’empereur de Tartarie ?

— Oh ! toujours de même, ni mieux ni pis.

— Et le jeune prince de la Chine, dit le vieux gentleman avec beaucoup d’intérêt, est-il réconcilié avec mon beau-père, le grand négociant en pommes de terre ?

— Non, répondit la voix rude, et ce qui est bien plus fort, c’est qu’il dit qu’il ne se réconciliera jamais avec lui.

— En ce cas, dit le vieux gentleman, je ferai peut-être bien de descendre.

— C’est cela, lui répondit-on de l’autre côté, je crois que vous ne ferez pas mal. »

Alors une des mains se détacha avec précaution d’une des jambes prisonnières ; le vieux gentleman se baissa pour se mettre sur son séant, et il se retournait pour sourire à Mme Nickleby et la saluer encore, lorsqu’on le vit disparaître avec précipitation, comme si quelqu’un l’avait tiré en bas par les jambes.

Catherine se sentit soulagée par cette disparition soudaine, et se disposait à parler à sa mère lorsque les mains sales reparurent à l’horizon, suivies immédiatement d’un gros homme trapu qui venait de monter à l’échelle précédemment occupée par leur étrange voisin.

« Je vous demande pardon, mesdames, dit le nouveau venu, ricanant et touchant par respect le bord de son chapeau ; n’a-t-il pas fait la cour à l’une de vous ?

— Oui, dit Catherine.

— Ah ! répliqua l’homme, prenant son mouchoir dans son chapeau pour s’essuyer le front, il n’y manque jamais, voyez-vous ; il n’y a rien qui puisse l’empêcher de faire la cour à quelque dame.

— Pauvre homme ! on n’a pas besoin de vous demander s’il est fou.

— Oh pour cela, non, répliqua l’homme regardant le fond de