Page:Dickens - Nicolas Nickleby, trad. Lorain, 1885, tome 2.djvu/139

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que Nicolas ne put s’empêcher de croire que l’histoire était parfaitement vraie dans ses détails essentiels.

« Voici la seconde fois, dit Nicolas, que nous nous trouvons à table ensemble, et la troisième seulement que je vous vois ; eh bien ! je me trouve aussi à mon aise avec vous qu’avec de vieux amis.

— C’est tout comme moi, dit John.

— Et moi aussi, ajouta sa jeune épouse.

— Oui ; mais, dit Nicolas, ce n’est pas la même chose. Moi, j’ai des raisons particulières de reconnaissance. Sans votre bon cœur, mon brave ami, moi qui n’y avais aucun droit, je ne sais pas ce que je serais devenu, ni comment je me serais tiré d’affaire dans ce moment-là.

— Parlez donc d’autre chose, répliqua John d’un air bourru. Vous m’ennuyez.

— En ce cas, continua Nicolas en souriant, je vais vous chanter une autre chanson, mais toujours sur le même air. Je vous ai déjà dit dans ma lettre tout ce que je sentais de gratitude pour l’intérêt que vous avez témoigné à ce pauvre Smike, en lui rendant la liberté au risque de vous attirer des désagréments. Mais je ne saurais assez vous répéter combien nous vous sommes tous reconnaissants, lui, moi, et d’autres encore que vous ne connaissez pas, pour avoir eu pitié de lui.

— Ah ! s’écria Mme Browdie ; toute cette soirée-là j’étais sur les épines.

— Ont-ils eu l’air de vous croire pour quelque chose dans sa délivrance ? demanda Nicolas à John Browdie.

— Ils n’y ont seulement pas pensé, répondit le gros rieur en montrant ses dents d’une oreille à l’autre. J’étais là bien à mon aise dans le lit du maître d’école, longtemps encore après la brune, et personne ne venait. C’est bon ! que je me disais ; maintenant le garçon a pris de l’avance ; s’il n’est pas chez lui à l’heure qu’il est, c’est qu’il n’y sera jamais. Ainsi vous pouvez venir quand vous voudrez, vous nous trouverez prêts ; c’est du maître d’école que je parlais, vous comprenez ?

— Je comprends bien, dit Nicolas.

— Bon ! le voilà donc qui vient. J’entends fermer la porte en bas et monter à tâtons… Allez doucement, vous ne tomberez pas, que je me dis en moi-même ; prenez votre temps, monsieur, il n’y a rien qui presse… Le voilà à la porte, il tourne la clef, il tourne la clef, il tourne toujours, il aurait pu tourner jusqu’à demain, la serrure était par terre… Holà, qu’il crie. — Oui, que je me dis, criez, mon bonhomme, tant que vous voudrez, vous ne