Page:Dickens - Nicolas Nickleby, trad. Lorain, 1885, tome 2.djvu/185

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subite de Catherine, et par l’apparition de Ralph Nickleby, qui entra dans la chambre.

« Restez, » dit Ralph à Nicolas, qui se leva brusquement, et à Catherine, qui s’avançait vers son frère pour s’attacher à son bras. « Avant que ce garçon-là dise un mot, écoutez-moi. »

Nicolas se mordit les lèvres et secoua la tête d’un air menaçant, mais il lui fut impossible pour le moment d’articuler une syllabe. Catherine se serra contre lui, Smike se réfugia derrière eux, et John Browdie, qui, d’après ce qu’il avait entendu dire de Ralph, ne parut pas avoir grande difficulté à le reconnaître, se tint entre son jeune ami et le vieil usurier avec l’intention de les empêcher, l’un ou l’autre, d’avancer un pas de plus.

« Écoutez-moi, vous dis-je, répéta Ralph, et ne l’écoutez pas.

— Alors, reprit John, dépêchez-vous, monsieur, de dire ce que vous avez à dire, et tâchez de ne pas vous échauffer le sang, vous ferez mieux de vous le rafraîchir.

— Oh ! vous, dit Ralph, je vous reconnaîtrais à votre langue, comme lui (en montrant Smike) à sa mine.

— Ne lui parlez pas, dit Nicolas recouvrant la parole, je ne souffrirai pas cela ; je ne veux pas l’entendre, je ne connais pas cet homme-là, je ne peux pas respirer l’air qu’il corrompt par sa présence ; sa présence elle-même est une insulte pour ma sœur ; je suis honteux de le voir ici, je ne souffrirai pas que…

— Tenez-vous tranquille, cria John en lui appuyant sa large main sur la poitrine.

— Alors qu’il se retire à l’instant, dit Nicolas se débattant, qu’il se retire, s’il ne veut pas que je porte la main sur lui ; je ne lui permettrai pas de rester ici. John — John Browdie — suis-je ici chez moi ? — me prenez-vous pour un enfant ? Rien que de le voir là, cria Nicolas enflammé de colère, regarder avec tant de calme des gens qui connaissent trop la noirceur et la lâcheté de son cœur, je deviendrai fou. »

John Browdie ne répondit pas un mot à toutes ces exclamations, mais il retint toujours Nicolas sans lâcher prise, le laissa parler et reprit à son tour :

« Il y a là quelque chose à dire et quelque chose à entendre. Vous y avez plus d’intérêt que vous ne croyez. Quand je vous dis que je me doute déjà de quelque chose ! tenez, qu’est-ce que c’est donc que cette ombre que je vois là-bas, derrière la porte ?… Eh ! le maître d’école ! montre-toi donc, mon homme, ne sois pas comme cela tout honteux ; et vous, le vieux monsieur, allons, faites donc entrer le maître d’école. »