Page:Dickens - Nicolas Nickleby, trad. Lorain, 1885, tome 2.djvu/387

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personnes que je connais, répliqua-t-elle ; ce sont plutôt les vôtres. Vous n’avez pas besoin de me faire de gros yeux. Gardez-les pour une meilleure occasion, vous ferez mieux.

— Voulez-vous, encore une fois, dit Ralph réprimant de son mieux sa colère et lui serrant le poignet de ses griffes ; voulez-vous aller dire à votre mari que je sais qu’il est à la maison, et qu’il faut que je le voie ? Voulez-vous bien me dire aussi ce que signifie, de votre part et de la sienne, ce changement de ton à mon égard ?

— Non, répondit-elle en dégageant son bras avec violence ; je ne veux ni l’un ni l’autre.

— Alors, c’est un défi que vous me jetez, n’est-ce pas ?

— Oui, prenez-le comme cela. »

Ralph, en ce moment, leva la main pour la battre ; mais il se retint et se contenta, en s’en allant, de lui faire de la tête des menaces muettes, et de marmotter entre ses dents qu’elle s’en souviendrait.

En sortant de là, il alla tout droit à l’auberge où descendait M. Squeers, et demanda s’il y avait longtemps qu’on l’y avait vu. Il avait une espérance vague qu’il y serait revenu, après avoir bien ou mal terminé sa mission, et qu’il pourrait au moins le rassurer. Mais on n’avait pas vu M. Squeers depuis dix jours, et, tout ce qu’on put lui dire, c’est qu’il avait laissé ses effets et n’avait pas payé son compte.

Troublé de mille inquiétudes et de mille soupçons, et voulant s’assurer si Squeers avait vent de ce qui se passait chez Snawley, ou s’il n’était pas pour quelque chose dans ce changement inexplicable, Ralph se hasarda à aller le demander à son logement de Lambeth, pour avoir une entrevue avec lui dans cet endroit compromettant. Impatient de vérifier ses craintes, sans plus attendre, il s’y rendit sur-le-champ ; et, comme il s’était fait décrire auparavant les lieux, il connaissait assez bien les êtres de sa chambre pour grimper l’escalier et frapper doucement à sa porte.

Un coup, deux coups, trois coups, douze coups, personne. « Serait-il endormi ? Écoutons par la serrure ; il me semble que j’entends le bruit de sa respiration. » Mais non, il s’était trompé, il n’y avait personne. Il s’assied patiemment, pour l’attendre, sur une marche ébréchée, persuadé qu’il était sorti pour quelque petite commission, et qu’il ne pouvait tarder à rentrer.

Plus d’une fois des pas résonnèrent et firent craquer l’escalier. Son oreille crut reconnaître ceux de son complice, et alors il se relevait, tout prêt à lui adresser la parole quand il allait