Page:Dickens - Nicolas Nickleby, trad. Lorain, 1885, tome 2.djvu/397

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combinés, de suborner une centaine de témoins, de me lâcher dans les chambres une centaine de mâtins, de me débiter une centaine de harangues, dans votre style doucereux, pour m’émouvoir ? Je vous remercie toujours de m’avoir dévoilé vous-même vos projets pour que je me prépare à les confondre. Vous ne savez pas à qui vous avez affaire. Vous verrez ! Rappelez-vous bien que je ne fais pas plus de cas de vos belles paroles et de vos trahisons que de la boue de mes souliers, que je ne vous crains pas, que je vous défie, que je me moque de vous, que je vous mets à pis faire. »

C’est ainsi qu’ils se séparèrent cette fois, mais Ralph n’était pas au bout de ses peines.


CHAPITRE XXVIII.

Le danger redouble : gare à la catastrophe.

Au lieu de retourner chez lui, Ralph se jeta dans le premier cabriolet qu’il trouva sur son chemin, et, se faisant conduire au poste de police du quartier où avait eu lieu la déconvenue de M. Squeers, se fit descendre à une petite distance, paya le cocher, et fit le reste à pied. Après avoir pris des renseignements sur le digne objet de sa sollicitude, il se trouva qu’il avait bien fait d’arriver ; car M. Squeers allait justement monter en voiture, comme un gentleman, pour aller passer son délai de huitaine à la Conciergerie.

Sur sa demande de dire un mot au prisonnier, il fut introduit dans une espèce de salle d’attente où, à raison de sa profession libérale et de son rang respectable, M. Squeers avait eu la permission de rester pendant le jour. En y entrant, il put reconnaître, à la lueur d’une chandelle fumeuse et coulante, le maître de pension profondément endormi sur un banc, dans un coin éloigné. Un verre vide, placé devant lui sur une table, faisait voir, avec son état somnolent et des exhalaisons de grog à l’eau-de-vie, que M. Squeers venait de chercher dans ce réconfort agréable un oubli temporaire de sa situation peu réjouissante.

Il eut bien du mal à se réveiller, tant son sommeil était lourd et léthargique. Il finit pourtant par retrouver petit à petit une lueur de raison, et par s’asseoir sur son séant. Alors montrant