Page:Dickens - Vie et aventures de Martin Chuzzlewit, 1866, tome2.djvu/274

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der le déjeuner. Il n’y a pas… il n’y a pas de sonnette dans ma chambre. »

Pendant ce temps, Montague avait fait entrer le garçon d’auberge, qui lui apportait de l’eau chaude et ses bottes. Celui-ci, en entendant les dernières paroles de Jonas lui assura qu’il y avait une sonnette, et il passa dans la chambre adjacente pour la lui faire voir au chevet du lit.

« Alors, c’est que je n’ai pu la trouver, dit Jonas ; cela revient au même. Commanderai-je le déjeuner ? »

Montague en fut d’avis, et, quand Jonas se fut retiré à travers sa chambre en sifflant un refrain, vite il ouvrit la porte de communication pour en retirer la clef et s’enfermer à double tour ; mais la clef n’y était déjà plus.

Il tira une table en travers de la porte et s’assit pour rassembler ses idées, comme s’il était encore sous l’influence de ses rêves.

« C’est un voyage fatal, répéta-t-il plusieurs fois. C’est un voyage fatal. Mais je reviendrai seul. Je ne veux plus de tout ça ! »

Cette espèce de pressentiment ou de superstition que c’était un voyage fatal, ne le détourna pas de la mauvaise action qu’il avait en vue dans ce voyage même. Il s’habilla avec plus de soin que d’habitude, afin de produire une impression favorable sur M. Pecksniff, et, rassuré par sa bonne mine, par la beauté du temps, par le gai soleil qui faisait étinceler les branches mouillées devant sa fenêtre, il revint peu à peu à son état naturel, articula quelques gros jurons et chantonna le refrain d’une chanson.

Et cependant, de temps à autre, il grommelait entre ses dents :

« Je reviendrai seul ! »