Page:Dickens - Vie et aventures de Martin Chuzzlewit, 1866, tome2.djvu/436

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

visite de M. Tapley, qui arriva aussi frais, aussi dispos, aussi joyeux que le Matin en personne.

Il frappa à la porte un léger coup, qui mit à l’instant sur pied M. Chuzzlewit.

« Vous êtes ponctuel, dit le vieillard, allant ouvrir aussitôt.

– Ma devise, monsieur, répondit M. Tapley, qui d’après cela paraissait avoir roulé dans sa tête les devoirs matrimoniaux, ma devise, c’est : amour, honneur et obéissance. L’horloge sonne sept heures, monsieur.

– Entrez !

– Merci, monsieur. Qu’ai-je à faire d’abord pour votre service, monsieur ?

– Vous avez exécuté ma commission auprès de Martin ? dit le vieillard fixant ses yeux sur lui.

– Oui, monsieur, répondit Mark, et jamais de votre vie vous n’avez vu gentleman aussi surpris que lui.

– Que lui avez-vous dit en outre ?

– Par exemple, monsieur, répondit M. Tapley en souriant, j’aurais bien aimé à lui en dire un peu plus ; mais, faute d’en savoir davantage, je ne lui ai rien dit du tout.

– Vous lui avez confié ce que vous saviez ?

– C’était si peu de chose, monsieur ! répliqua M. Tapley. Je n’avais vraiment pas à lui dire grand’chose qui vous concernât, monsieur. Je lui ai seulement dit que, dans mon opinion, M. Pecksniff se trouverait trompé, monsieur, que vous seriez trompé vous-même, et que lui aussi il serait trompé comme les autres, monsieur.

– En quoi ? demanda M. Chuzzlewit.

– En ce qui le concerne, n’est-il pas vrai, monsieur ?

– En ce qui nous concerne, lui et moi.

– Très-bien, monsieur, dit Tapley, quant aux anciennes idées que vous aviez l’un de l’autre. Pour ce qui est de lui, monsieur, et de ses idées, je sais qu’il a joliment changé, je vous en réponds. Je le savais longtemps avant qu’il vous parlât l’autre jour, et, je dois vous le dire, personne ne peut le connaître à moitié aussi bien que moi ; personne. Il y avait toujours eu en lui beaucoup de bon, mais je ne sais comment ça s’était un peu encroûté. Je ne vous dirai pas qui est-ce qui avait pétri la pâte de cette croûte, mais…

– Continuez, dit Martin, pourquoi vous arrêter ?

– Mais… Eh bien ! je vous demande pardon, mais je pense que c’est peut-être bien vous, monsieur : sans intention,