Page:Dickens - Vie et aventures de Martin Chuzzlewit, 1866, tome2.djvu/99

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suicidés par strangulation. Se rappelant avoir vu dans l’autre armoire une bouteille de vin de Porto et quelques biscuits, il y fouilla de nouveau et se restaura solidement : durant tout ce temps, il paraissait profondément absorbé, comme si ses pensées étaient ailleurs.

Il eut bientôt pris son parti, ou plutôt son parti était déjà pris ; ayant resserré la bouteille et les biscuits, il ouvrit la fenêtre. Il descendit sans difficulté dans le cimetière, ferma la fenêtre après lui, et se rendit tout droit à son logis.

« M. Pinch est-il à la maison ? demanda M. Pecksniff à sa servante.

– Il vient de rentrer, monsieur.

– Il vient de rentrer ? répéta M. Pecksniff, d’un air joyeux. Et il est monté, je suppose ?

– Oui, monsieur. Il est monté. Voulez-vous que je l’appelle, monsieur ?

– Non, dit M. Pecksniff, non. Vous n’avez pas besoin de l’appeler, Jane. Je vous remercie, Jane. Comment vont vos parents, Jane ?

– Très-bien. Merci, monsieur.

– J’en suis charmé. Faites-leur savoir que je me suis informé d’eux, Jane. M. Chuzzlewit est-il ici, Jane ?

– Oui, monsieur. Il est au parloir, occupé à lire.

– Vous dites, Jane, qu’il est dans le parloir, occupé à lire ? Très-bien. Alors je pense que je vais aller le voir, Jane. »

Jamais on n’avait aperçu M. Pecksniff en plus belle humeur !

Mais quand M. Pecksniff entra dans le parloir où le vieillard était assis, comme l’avait dit Jane, avec une plume, de l’encre et du papier sur une table à sa portée (car M. Pecksniff était toujours attentif à le bien approvisionner des instruments nécessaires pour écrire), il devint un peu moins gai. Il n’était pas en colère, il n’aspirait pas à la vengeance, il n’était pas sombre, il n’était pas morne ; il était seulement affligé, bien affligé certainement. Lorsqu’il s’assit à côté du vieillard, deux larmes, non pas de ces larmes avec lesquelles les anges chargés là-haut de nos comptes effacent nos péchés en les inscrivant sur le grand livre, mais de ces larmes hypocrites du pécheur endurci dont ils composent leur encre, glissèrent furtivement le long de ses joues vénérables.

« Qu’y a-t-il ? demanda le vieux Martin. Pecksniff, qu’avez-vous, mon garçon ?