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BOU

BOUILLARD. s. m. Quelques-uns nomment ainsi sur la mer, certain nuage qui donne du vent & de la pluie. Nubes ventorum ac pluviæ prænuncia.

BOUILLE. s. f. Terme de pêche. C’est une longue perche grosse par le bout en forme de rabot, qui sert à remuer la vase & à troubler l’eau, afin que le poisson entre plus facilement dans les filets.

Bouille, est aussi le nom d’un vaisseau servant dans les salines à mesurer du charbon ou de la braise.

BOUILLE-COTONIS, BOUILLE-CHARMAIY. Ce sont deux espèces de ces satins des Indes, qu’on nomme en général des Atlas.

Bouille. Droit qui se paye en Roussillon pour la marque des draps, & autres étoffes de laine. Bouille se dit aussi de l’empreinte ou marque qui se met par les Commis à chaque pièce de drap ou autres étoffes de laine déclarées au bureau des fermes du Roi.

BOUILLER. v. a. Se servir de bouille pour remuer la vase & en faire sortir le poisson afin de le faire entrer dans les filets. Limum agitare. L’Ordonnance des Eaux & Forêts défend aux Pêcheurs de bouiller, de se servir de bouilles & de rabots dans leurs pêches.

Bouiller une étoffe : c’est la marquer de la manière réglée par les arrêts & déclarations du Roi. L’art. 299 du bail des Gabelles, & autres droits réunis, porte que dans le Roussillon, tous les Marchands, Ouvriers & Facteurs de drap, & autres étoffes de laine dudit pays, seront tenus d’en faire leurs déclarations aux plus prochains bureaux, & de les faire bouiller ou marquer de la marque de l’adjudicataire, conformément au Règlement de 1658, & sous les peines y portées.

☞ BOUILLÉ, ÉE. part. Voyez Bouiller.

BOUILLI. s. m. Voyez le participe de Bouillir.

BOUILLIE. s. f. C’est une sorte de mets préparé pour la nourriture des enfans, qui ne peuvent encore mâcher ni digérer les viandes. Puls. Elle se fait avec du lait & de la farine délayée & cuite. Les gens âgés en usent aussi quelquefois. Valère Maxime dit qu’une marque de la sobriété des premiers Romains, c’est qu’ils mangeoient beaucoup plus de bouillie que de pain. Dans le haut pays d’Auvergne les peuples ne mangent aussi que de la bouillie faite de farine de blé noir, & boivent du petit lait, & ils ne laissent pas d’être bien sains & bien vigoureux. Rochef.

Bouillie, se dit familièrement des choses qu’on a fait bouillir trop long-temps, qui sont trop cuites, & qui font une espèce de bouillie. Ce chapon est si cuit, que ce n’est plus que de la bouillie. On fait bouillir les peaux des pieds de bœufs jusqu’à ce qu’ils soient réduits en bouillie.

On dit proverbialement, faire de la bouillie pour les chats ; pour dire, faire une chose qui sera inutile.

BOUILLIR. v. n. Fervere, bullire. Ce verbe se conjugue ainsi. Je bous, tu bous, il bout. Nous bouillons, vous bouillez, ils bouillent. Je bouillois. Je bouillis. J’ai bouilli. Je bouillerai. Bous. Que je bouillisse. Je bouillerois. C’est se renfler, se gonfler, se raréfier, soit par la chaleur naturelle de la fermentation. Voyez Fermentation ; soit par un feu actuel qu’on applique au-dessous de quelque liqueur. Le vin, le cidre bouillent dans les tonneaux en fermentant. La chaux vive bout quand on l’arrose d’eau. Voyez Chaux. L’eau bout sur le feu. Il y a des lacs qui bouillent quand il doit arriver quelque orage.

Les particules du feu poussées en tourbillon avec une grande vitesse, passent à travers les pores du vaisseau, & se mêlant avec la liqueur, communiquent leur mouvement à ses parties. Cette action continuée rend le mouvement du fluide plus violent. Les particules du feu venant à frapper sur celles du fluide qui sont au fonds du vaisseau les poussent en haut, pendant que celles du haut descendent vers le fond : ce qui fait un flux continuel du fluide du fond vers le haut, & du haut vers le fond du vaisseau.

L’eau froide, dans la machine pneumatique, paroît bouillir, quand on a pompé l’air, parce que l’air renfermé dans les interstices de l’eau, n’étant plus pressé par l’air extérieur, se dilate, se dégage avec force, souleve l’eau, & produit une espèce d’ébullition.

Bouillir, se dit d’un vaisseau dans lequel est la liqueur qui bout, & des autres choses qu’on met dedans pour les cuire, ou pour les épaissir. La marmite bout. Faire bouillir. Fervefacere. On fait bouillir la viande pour faire de la soupe. On fait bouillir du miel, du sucre, du sirop, pour lui donner une consistance plus épaisse.

On dit figurément des gens courageux & ardens, que leur sang leur bout dans les veines. On le dit aussi de ceux qui sont encore dans la vigueur de leur jeunesse ; ce qui fait dire à Malherbe ; quand le sang bouilloit dans mes veines, je, &c.

Ceux à qui la chaleur ne bout plus dans les veines,
En vain dans les combats ont des soins diligens,
Mars est comme l’amour, ses travaux & ses peines,
Veulent de jeunes gens.

On dit encore de ceux qui sont exposés à la grande ardeur du soleil, que la tête, que la cervelle leur bout. On dit encore de celui qui est agité de quelque violente passion d’amour, de colère, & sur-tout d’impatience, qu’il bout de rage, de vengeance ; & absolument qu’il bout.

On dit proverbialement il me semble qu’on me bout du lait ; pour dire, qu’on se moque de moi. Dans cette phrase bouillir est employé activement. On peut aussi s’en servir dans un sens favorable, pour signifier, faire plaisir à quelqu’un, lui dire des choses agréables. Loin de le fâcher, c’est lui bouillir du lait. On dit qu’un homme n’est bon ni à rôtir ni à bouillir ; pour dire, qu’il n’est propre à rien, que c’est un homme inutile. On dit aussi d’un profit qui vient journellement, que cela fait bouillir la marmite. Mainard a dit que le feu des vers n’est point propre à la faire bouillir, c’est-à dire, qu’il ne peut fournir à la dépense de la maison. Toutes ces expressions sont populaires.

BOUILLI, IE. part. & adj. Ce qui a bouilli. Decoctus. L’eau bouillie perd ses crudités. Bouilli, en parlant des viandes qu’on a fait bouillir dans l’eau. Elixus. La viande bouillie est plus aisée à digérer. Bouilli se prend aussi substantivement pour la viande qui a bouilli dans l’eau. Elixum. Le bouilli est un aliment succulent & nourrissant, sur-tout celui du bœuf.

On appelle proverbialement un visage de cuir bouilli, un homme qui a le teint noir, le cuir épais & rude. On dit aussi, pour mépriser un mets mal apprêté, rôti, bouilli, traîné par les cendres.

BOUILLITOIRE. s. m. terme de monnoie. Donner le bouillitoire ; pour dire, jeter les flans dans la bouilloire, & les faire bouillir pour les nettoyer jusqu’à ce qu’ils soient devenus tout-à-fait blancs. Ce mot est aussi feminin. Donner la bouillitoire.

BOUILLOIRE. s. f. Vaisseau de cuivre ou d’autre métal, propre à faire bouillir de l’eau.

Bouilloire. s. f. Terme de monnoie. Vaisseau de cuivre dans lequel il y a de l’eau bouillante avec du sel commun & du tartre de Montpellier, ou gravelée, & où l’on jette les flans que l’on a laissés refroidir dans un crible de cuivre rouge, après qu’ils ont été assez recuits. Vas monetæ expurgandæ comparatum. On les fait bouillir dans cette bouilloire pour les décrasser, après quoi on les jete dans une autre bouilloire remplie de même que le premier, où on les fait encore bouillir pour achever de les nettoyer.

BOUILLON. s. m. Partie qui s’éleve en rond sur la surface des liqueurs échauffées, soit par la fermentation naturelle, soit par le feu. Unda. Le pot bout à gros bouillons. Il ne faut que deux ou trois bouillons pour faire de la tisane. Cela se dit des choses qu’il ne faut pas faire bouillir long-temps.

Bouillon, se dit aussi de la liqueur qui a long-temps bouilli avec de la viande, des herbes ou autre chose, pour servir ensuite d’aliment. Bouillon succulent, nourrissant. Mettez du bouillon dans ce potage. Jus.

On dit aussi, prendre un bouillon ; pour dire, prendre une portion de suc de viandes ou d’herbes. Cet homme ne vit que de bouillons, est réduit aux bouillons. On prend aussi des bouillons pour se rafraîchir, & conserver son embonpoint.