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d’une marche de pierre ; c’est pourquoi on dit qu’elle porte son délardement.

Délardée, ée. part. Chevron délardé. Marche d’escalier délardée.

☞ DÉLASSEMENT. s. m. Terme relatif au besoin que le corps & l’ame ont de repos. Par rapport au corps, c’est le relâche qu’on prend après le travail : cessation de travail dans la vue de réparer les forces. Par rapport à l’esprit c’est un passe temps pour le distraire de ses fatigues. Corporis, animi refectio, recreatio. Amusement dit une occupation légère, & qui plaît. Divertissement paroît annoncer des plaisirs plus vifs & plus étendus. Récréation dit un court délassement. Voyez ces mots. Après de grands travaux, il faut du délassement. Le jeu est un travail pour les uns, & un délassement pour les autres. La Comédie fut toujours le délassement des grands hommes, le divertissement des gens polis & l’amusement du peuple. S. Evr. Dans cette auguste retraite ou il daigne quelquefois m’admettre à ses délassemens, dans ces momens heureux, où il tempère l’éclat qui l’environne pour descendre jusqu’à nous, je recueillerai plus soigneusement que jamais ses paroles, Le Duc de la Force, parlant du Roi.

☞ DÉLASSER, v. a. Donner du relâche. Se délasser, réparer ses forces par la cessation du travail, distraire l’esprit de ses fatigues par quelque passe-temps. Le sommeil délasse. On se couche pour se délasser. Le jeu délasse l’esprit. Corpus, animum recreare, reficere. Délasser le Roi de ses nobles travaux. Mol. Il faut délasser l’esprit qui est trop tendu. Ablanc. Allons nous délasser à voir d’autres procès. Racine. Alexandre étant à Ephèse, pour se délasser l’esprit, alloit souvent à la boutique d’Apelle, fameux Peintre de son temps. Du Ryer.

Délassé, ée, part.

☞ DÉLATEUR. s. m. On donnoit ce nom à Rome, à des Citoyens qui devenoient les accusateurs secrets ou déclarés de leurs Concitoyens. Delator. Les délateurs étoient fort à craindre dans l’ancienne Rome. Les délateurs étoient fort communs & fort odieux.

Les déserts autrefois peuplés de Sénateurs,
Ne sont plus habités que par leurs délateurs. Rac.

☞ DÉLATEUR. En Jurisprudence, est celui qui dénonce à la justice un crime ou un délit, & celui qui en est l’auteur, sans se porter partie civile. En quoi il diffère de l’accusateur, qui défère aussi un crime à la Justice, en rend plainte, mais en poursuit la réparation comme partie civile.

☞ On ne se sert chez nous que du mot de dénonciateur que l’on regarde comme synonyme de délateur dans toute la rigueur d’une parfaite ressemblance. Cependant celui de dénonciateur paroît avoir une signification plus étendue, & convenir à toutes sortes de dénonciations : au lieu que celui de délateur est plus à sa place quand il est question de dénonciations odieuses. Le délateur est presque toujours l’instrument de la passion d’autrui, conduit par des impressions étrangères, ou par des motifs qui le rendent vil & odieux. Le dénonciateur peut-être animé par des motifs louables & honnêtes.

☞ DÉLATION. s. f. Delatio. Dénonciation d’un crime fait à la justice par quelqu’un qui n’est point personnellement intéressé à la poursuite de ce crime. Dans les crimes de Lèse-Majesté on arrête souvent sur une simple délation. On ne décide point de la vie d’un homme sur une simple délation.

DÉLATTER. v. a. Oter les lattes de dessus un toît. Tegulas detrahere. Il faut délatter ce toît, & le relatter à neuf.

☞ DÉLAVÉ. ée. adj. ou participe du verbe délaver qui n’est plus en usage. Terme de teinture qui se dit des couleurs foibles & blafardes. Voyez ces mots. Ce bleu est trop délavé. Dilutior est.

☞ Les Joailliers appellent aussi pierre délavée, celle dont la couleur est foible.

☞ DÉLAYANT. s. m. ou adj. pris substantivement. Terme de Médecine. Remède qui rend les humeurs plus fluides, en écartant leurs parties unies & serrées, & mettant entr’elles un liquide qui les tient plus séparées. Le principal délayant est l’eau. Diluens. Les tisannes rafraîchissantes, les émulsions, les eaux de poulet, de riz, d’orge, de coquelicoc, &c. sont des délayans. Bouillet. On rend ces délayans plus efficaces par l’addition du sel de prunelle, du nitre purifié ; de l’esprit de vitriol ou de souffre. Id.

DÉLAYER, v. a. Détremper, rendre une chose liquide, ou plus liquide qu’elle ne l’étoit auparavant ; ce qui se fait par le mélange de quelque liqueur. Diluere. Il faut bien délayer la farine pour faire de la bouillie ou de la colle. On délaye de l’ocre avec de l’huile pour peindre des travées, des portes, &c. plusieurs prononcent dilayer, mais mal.

Ce mot vient du Latin diluere, ou de deliquare. Ménage.

Délayé, éé. part.

DELAYER, v. n. Vieux mot. User de délai, différer. Poes. de Jean le Févre.

DELBRUGH ou DELBURGK. Bourg, ou petite ville du cercle de Westphalie. Delbruggia. Ce lieu est près des sources de l’Ems, dans l’Evêché de Paderborne. C’est à Delbrug que les Légions de Varus furent taillées en pièces, & que Germanicus vengea cet affront fait au nom Romain, par la défaite des Bructères, dont ce fut la dernière habitation. Voyez les Monumenta Paderbornensia, p. 57.

DÉLEALTÉ. s. f. Vieux mot. Déloyauté.

DÉLÉAN, ou selon la prononciation Hébraïque, Dilean. Ville de la Tribu de Juda, Jos. XV. 38. Les Septante la nomment Δάλαδ. Selon les principes posés par le P. Soucier, Jésuite, dans sa Dissertation sur les médailles Hébraïques, & sur les premières lettres Hébraïques, c’est une faute du Copiste, on a pris un nun de l’ancien & vrai caractère Hébreu, pour un daleth du même caractère, ce qui est faisable dans un exemplaire usé.

☞ DÉLECTABLE. adj. de t. g. Quelquefois employé substantivement. Cette épithète paroît convenir aux choses qui flattent les sens ou le goût. Delectabilis, delectationem afferens. On dit d’un lieu, d’un séjour, qu’il est délectable. Ce vin, ces mots sont délectables. Il faut préférer l’honnête au délectable.

Que toujours cher à mes amis, Mêlant l’utile au délectable, Leur amitié tendre & durable Me tienne ce qu’il m’ont promis. Nouv. choix de vers.

☞ Je haïrois ce mot, dit le P. Bouhours, si M. de la Chambre ne s’en servoit pas quelquefois. Il peut passer en fait de morale.

DÉLECTABLETÉ. s. f. Vieux mot. Joie. On a dit dans le même sens Délitablete, déliteux & délicteux, pour délicieux, agréable.

DÉLECTATION. s. f. Delectatio. Sentiment doux & agréable, plaisir qu’on savoure, qu’on goûte avec réflexion. On boit, on mange avec délectation. On prend trop de délectation aux choses du monde. Ce mot n’est guère dans l’usage ordinaire. Il est admis en fait de morale. Il est très-familier parmi ceux qu’on appelle Jansenistes. Il répand une douceur céleste qui surmonte la délectation de la chair. Pasc.

☞ Selon le sistême des Jansenistes il y a deux délectations qui entraînent les hommes dans le bien ou dans le mal, d’une manière douce, mais invincible. Il semble que les différens accès de plaisir céleste ou terrestre nous rendent vertueux sans mérite, ou vicieux sans crime.

Les Jansénistes appellent leur grace nécessitante, une délectation victorieuse. Ils attribuent ce terme à S. Augustin ; & l’on croit communément, à la manière dont ils en parlent, que le S. Docteur s’en