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DEN

Denticulus. Les Médecins donnent le nom de dent à la seconde vertèbre du cou, à cause de sa figure. On dit qu’un couteau, ou autre ferrement taillant, a des dents, quand il est ébréché. Les dents d’une scie, d’un peigne de serans, d’une roue de moulin, d’une horloge, d’une lime, d’un râteau, d’une herse. On dit aussi les dents d’une clef, en parlant de ces entaillures, qui sont dans le panneton au museau de la clef, & dans lesquelles passent les gardes.

On appelle aussi dents de passement, ces petites pointes d’ouvrages qui avancent sur les bords d’un passement. Denticuli.

☞ On le dit aussi, en Botanique, des petites échancrures que l’on voit au bord de quelques feuilles ; & l’on dit des feuilles ainsi échancrées qu’elles sont dentelées.

☞ On dit figurément & familièrement, la dent de la médisance, de la satire, pour dire, médire de quelqu’un, ou dire quelque mot qui l’offense, qui le pique.

Dent, se dit proverbialement en plusieurs phrases. Arracher une dent à quelqu’un, pour dire, tirer de lui quelque argent, ou autre chose qu’il est contraint de donner malgré lui. On dit qu’on prendroit aussi tôt la lune avec les dents, pour dire, qu’une chose est impossible. On dit d’un homme qui a bien faim, qu’il a les dents bien longues ; de celui qui est pauvre, qu’il n’a pas de quoi mettre sous la dent ; d’un goulu, qu’il mange de toutes ses dents ; qu’il a beau être malade, qu’il n’en perdroit pas un coup de dent ; que ce qu’on lui donne n’est pas pour sa dent creuse. On dit aussi, qu’il n’en cassera que d’une dent, qu’il n’en croquera que d’une dent, pour dire, qu’il ne mangera point de quelque chose, ou qu’il n’obtiendra point ce qu’il prétend. On dit aussi, avoir une dent de lait contre quelqu’un, ou simplement une dent, pour dire, avoir quelque ressentiment contre lui. On dit montrer les dents à quelqu’un, pour dire lui resister en face, lui témoigner qu’on ne le craint pas. On dit aussi, lui parler des grosses dents, pour dire, le menacer. On dit, malgré lui, malgré ses dents, pour dire, quelque empêchement qu’il puisse y mettre, ou apporter. On dit aussi, déchirer quelqu’un à belles dents, pour dire, médire cruellement de lui. On dit encore, parler, murmurer entre ses dents, pour dire, tout bas & sans vouloir être entendu : & on dit rire du bout des dents, quand on rit par force & sans en avoir envie. On dit aussi, qu’un homme n’a pas desserré les dents, pour dire, qu’il n’a dit mot. Prendre le mors aux dents, ou le frein, se dit au propre du cheval qui s’emporte. On le dit, au figuré, dans des acceptions différentes 1o D’un homme qui s’abandonne, qui secoue le joug de la règle, de la loi, de la bienséance. 2o. D’un homme, qui, après avoir enduré de quelqu’un, s’affranchit de la sujétion. 3o. De celui qui, après avoir négligé son devoir ou ses affaires, s’y porte avec ardeur. On dit qu’on est sur les dents, que le grand travail a mis quelqu’un sur les dents, pour dire, qu’il est las & fatigué, qu’il n’en peut plus ; & on dit d’un agonisant, qu’il a la mort entre les dents. On dit, pour se moquer d’un pédant, qu’il est savant jusqu’aux dents. Ce proverbe vient de ce qu’autrefois on ne tenoit personne pour savant, jusqu’à ce qu’il fût passé Docteur : ce qui ne se faisoit qu’après de fort grands repas, ou l’on exerçoit bien ses dents. Depuis on y a ajoûte, qu’il a mangé son Bréviaire. On dit d’un Cavalier armé de toutes pièces, qu’il est armé jusqu’aux dents. On dit ironiquement d’une vieille sans dents, qui a perdu toutes ses dents, qu’elle n’a pas une dent en bouche. Au contraire, on dit d’un vieillard qui se porte bien, qu’il a encore toutes ses dents, qu’il a de bonnes dents. On dit de celui qui a quelque dent qui avance plus que les autres, que c’est Geoffroy à la grand’dent ; & de celui qui est mort, il y a long-temps qu’il n’a plus de mal aux dents. On dit aussi aux enfans qu’une chose a des dents, qu’elle mord quand on la manie, lorsqu’ils sont en danger de se blesser. Ses composés Trident, curedent, brèchedent, daquedent, Surdent, Tire-aux-dents, sont à leur ordre.

☞ Dans la plupart de ces phrases proverbiales le mot dent est pris dans un sens figuré.

En termes de Philosophie Hermétique, les dents du dragon que Cadmus sema, & dont il naquit des soldats qui s’entretuerent, signifient le fixe & le volatil qui agissent l’un contre l’autre, qui se détruisent l’un l’autre.

Dent de chien. s. f. Dens canis. Plante dont il y a deux espèces. La première pousse ordinairement deux feuilles & quelquefois trois répandues à terre ayant la figure approchante de celles du lis des vallées, mais plus charnues, arondies, marbrées de grandes taches blanches tirant sur le purpurin. Il s’élève d’entre elles un pédicule haut comme la main, lisse, rouge, portant une belle fleur à six feuilles, oblongues, pointues, penchées, & recoquillées vers le haut, quelquefois blanches, quelquesfois purpurines. Quand cette fleur est tombée, il lui succède un fruit presque rond & rélevé de trois coins de couleur verte, marbrée de rouge, qui renferme des semences jaunâtres. Sa racine est oblongue, blanche, charnue & plus menue en haut qu’en bas, & ayant en quelque manière la figure de la dent d’un chien. La seconde espèce ne diffère de la première qu’en ce que ses feuilles sont plus longues & plus étroites, que sa fleur est plus grande & sa racine plus grosse, leurs racines sont résolutives & amollissantes. Il ne faut pas confondre cette plante avec le chiendent que les Latins nomment Gramen.

Dent de lion. Dens leonis. Plante qui a pris ce nom de la découpure de ses feuilles, qu’on dit avoir quelque rapport avec l’arrangement & la disposition des dents du lion ; c’est sur tout dans l’espèce la plus ordinaire qu’on trouve cette prétendue convenance. Sa racine est grosse comme le doigt, & remplie d’un suc laiteux. Elle pousse à son collet plusieurs feuilles longues, plus ou moins suivant le terrein où elle naît, tantôt larges, tantôt étroites, & découpées le plus souvent sur les bords en manière de dent. D’entre ses feuilles s’élève un pédicule simple, creux, long comme le doigt, plus grand suivant la force de la plante, qui soutient une fleur composée de plusieurs demi fleurons jaunes, renfermés dans un calice qui se referme, lorsque les semences qui soutiennent chaque demi-fleuron, sont mûres. Elles sont chargées d’une aigrette qui s’étend en rond, & qui sert à les rendre plus légères, & plus propres à être emportées par le vent. Ces semences sont rougeâtres ou jaunâtres. Le vulgaire appelle cette plante le pissenlit. Lectiminga, peut-être parce qu’elle provoque les urines, & qu’elle est apéritive. On met dans les salades les nouvelles feuilles & les jeunes pousses de la dent de lion. La plante appelée hieracium ne diffère de la dent de lion, que parce qu’elle donne des tiges ordinairement branchues.

DENTAIRE, s. f. Dentaria. s. f. On a attribué ce nom autrefois à quelques plantes qui avoient leurs racines écailleuses & comme dentées ; à présent c’est celui d’un genre de plante, dont les fleurs sont en croix, & les racines sont plus ou moins écaillées. L’espèce la plus ordinaire a sa racine blanchâtre lorsqu’elle est nouvelle, noirâtre lorsqu’elle vieillit, garnies de quelques fibres & de plusieurs écailles ou inégalités en manière de dents rangées dans une mâchoire. Chaque écaille est ordinairement blanchâtre sur son bord. De cette racine s’élève une tige haute de sept à huit pouces ronde, verdâtre, droite & chargée de deux à trois feuilles, découpées jusqu’à leurs collets, le plus souvent en sept segmens oblongs, dentelées sur leurs bords, opposées par paire sur cette même côte qui est terminée par un seul segment. Le nombre de sept a fait donner à cette plante le nom de Dentaria heptaphyllos. Sa