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DES

vient en devant où on le noue négligemment sous le menton, & les deux bouts viennent prendre jusqu’à la ceinture. On porte des désespoirs de toutes les couleurs. Elle avoit mis une coëffe blanche, mouchetée de couleur de rose, avec un désespoir de même couleur. Crébillon.

DÉSESTIMER. v. a. Vieux mot. Mépriser, faire peu de cas. Aspernari, contemnere, vilipendere.

Désestimé, ée. part.

DÉSÉTOURDIR. v. a. Ce mot se trouve dans Pomey, pour ramener quelqu’un de son étourdissement. Alicujus stuporem discutere. Je ne suis point encore désetourdi. Ce mot n’est plus en usage.

DÉSÉTRINER v. n. Oter les pieds de dedans les étriers. C’est du moins ce qu’on croit qu’a voulu dire l’Auteur de la troisième partie du Roman comique dans ce passage : son cheval s’embourba si fort, que tout ce qu’il put faire, ce fut de désétriner promptement, & désarçonner en même temps, & de mettre pied à terre. Ce mot sent bien la Province.

DÉSEVRANCE. s. f. Vieux mot. Séparation.

DÉSEVRER. Vieux mot. Rompre, quitter.

Ainsi la paix fut pourparlée,
Et la bataille désevrée.

Ce mot est venu du Latin deserere, abandonner. Borel veut que sevrer un enfant vienne de là. On trouve ce même mot dans la signification de séparer.

Désevré, ée. part. Vieux mot. Dénué.

DÉSEXCOMMUNIER, v. a. Remettre dans la communion de l’Eglise une personne qui en avoit été retranchée. Lever l’excommunication. Henri Etienne fait le conte d’un Prêtre qui, ayant demandé du meilleur au Sommelier d’un Gentilhomme, & n’en ayant eu que du moindre, en fut si outré, qu’ayant apperçu ce Sommelier à sa messe, il en perdit la parole. Le Gentilhomme, qui avoit grand’hâte, envoya son laquais pour savoir quelle mouche l’avoit ainsi piqué : il répondit qu’il y avoit dans l’Eglise un excommunié qui l’empêchoit de poursuivre sa messe, & déclara que c’étoit le Sommelier, qui fut chassé. Messire Jean continua sa messe, après laquelle le pauvre Sommelier fut désexcommunié, à la charge de donner toujours à Messire Jean du vin de Monsieur & de Madame. Apol. pour Hérodote, t. 1. p. 2. chap. 22. p. 540. 541. Ce mot ne se trouve nulle part ailleurs.

DESGIGLER. v. a. Vieux mot. Borel dit qu’il croit que ce mot veut dire deshabiller.

DESGORGER. Vieux mot. Parler, c’est ce qu’en terme burlesque on diroit dégoiser. Gloss. sur Marot.

DÉSHABILLÉ. s. m. Robe-de-chambre, ou autres choses dont on se couvre quand on est chez soi en négligé, quand on s’habille, ou quand on se déshabille. Vestis cubicularis, cubicularia. On ne peut parler à Monsieur, il est encore dans son déshabillé, en robe-de-chambre.

Sous l’héroïque habit, dans le déshabillé.

Nouv. ch. de vers.

Déshabillé, se dit particulièrement dans le même sens des habillemens que les femmes portent quand elles gardent la chambre, par opposition à ceux dont elles se servent dans les visites de cérémonie. Elle étoit dans un déshabillé galant.

Déshabillé, dans un sens moral & figuré, signifie un état où l’on paroît tel que l’on est, sans se gêner ; il signifie aussi la manière de faire les choses sans art, sans préparation, sans affectation. Personne n’ose paroître dans son déshabillé : chacun se masque, chacun cherche une parure étrangère, pour s’offrir aux yeux du public. Deslandes. Montagne est un de ceux qui ont écrit sans art, ni préparation ; il s’est montré au public dans son déshabillé. Auteur anonyme récent.

DÉSHABILLER, v. a. Oter à quelqu’un les habits dont il est vêtu. Vestem detrahere, spoliare. Cette femme se déshabille & se r’habille deux ou trois fois par jour. Ce Prêtre s’est allé déshabiller à la Sacristie. En parlant d’un Prêtre, c’est quitter les ornemens. Cette garde-malade a été un mois sans se déshabiller. Vestem exuere.

On s’en sert quelquefois neutralement, en supprimant le nom personnel. Il a été trois mois sans déshabiller, il est du discours familier.

Déshabillé, ée. part. Exutus veste, spoliatus.

DÉSHABITER. v. a. Abandonner une maison, un pays où l’on habitoit. Orbare incolis, regionem aliquam deserere. La peste, la guerre, ont fait déshabiter des pays qui étoient fort habités. Il n’est pas en usage, dit l’Académie. On se sert adjectivement de son participe.

Déshabité, ée. part. & adj. Incultus, desertus. Les maisons déshabitées tombent bien-tôt en ruine. Pays déshabité, qui n’a plus d’habitans.

DÉSHABITUER, v. a. faire perdre une habitude à quelqu’un. Ab alicujus rei consuetudine abducere. Se déshabituer. Desuescere ab aliqua re. Cet homme a tant fait, qu’il s’est déshabitué de jurer. Il s’est déshabitué d’aller au Sermon.

Déshabitué, ée. part. Desuefactus.

DESHAIT. s. m. Vieux mot. Tristesse, désordre, dispute. Gloss. des Poë. du Roi de Nav.

DESHÂLER. Voyez DÉHÂLER.

DESHANCHÉ. Voyez DÉHANCHÉ.

DESHARNACHEMENT. Voyez DÉHARNACHEMENT.

DESHARNACHER. Voyez DÉHARNACHER.

DÉSHÉRENCE mieux que DÉHÉRENCE. s. f. Droit qui appartient au Roi ou à un Seigneur de fief de se mettre en possession des biens vacans d’un défunt situés dans l’étendue de sa haute Justice, lorsqu’il ne paroît point d’héritiers ; Jus in caduca bona. Quelques coutumes, comme celle de Normandie, bornent le droit de succéder au septième degré : mais d’ordinaire la succession a droit à l’infini : c’est pourquoi on appelle la déshérence, ligne éteinte ou ligne faillie. Les Docteurs prétendent que la déshérence est un droit Royal, qui n’appartient au Seigneur de fief que par usurpation. Le Bret. En bien des lieux la ligne maternelle succède à l’infini à la ligne paternelle qui est éteinte ; mais en d’autres, les maternels ne succèdent point aux paternels, ni de même les paternels aux maternels. La déshérence est à l’égard des immeubles, ce que l’épave est au regard des meubles.

☞ Le droit de déshérence est le droit de succéder à un regnicole né en légitime mariage, décédé sans avoir testé, & sans héritier apparent, c’est-à-dire, sans aucun héritier procréé de lui, ou de son lignage, habile par les loix de France & par les coutumes des lieux, à être héritier du défunt. Ainsi le droit de déshérence ne comprend pas les autres manières par lesquels des biens peuvent être vacans. Il ne comprend pas non plus les successions des aubains ni celles des bâtards. Voy. Aubain & Bâtard.

DÉSHÉRITER. v. a. Priver quelqu’un d’une succession ou d’une partie de succession à laquelle il étoit appelé par la loi. Exheredare, exheredem scribere. Le père peut déshériter ses enfans, quand ils se marient sans son consentement, & à quelque personne indigne. Voyez Exhéréder.

Déshérité, ée. part. Exheredatus, exheres.

DÉSHONNÊTE. adj. m. & f. Ce qui est contre sa pureté, ce qui blesse la chasteté & la pudeur. Inhonestus, obscenus, impurus. Il ne faut ni dire, ni entendre des paroles sales & déshonnêtes, ni lire des livres déshonnêtes ; entrer dans des lieux déshonnêtes, faire des gestes, des postures déshonnêtes. La pauvreté conseille & persuade tant de choses déshonnêtes. Patr. Les Stoïciens prétendoient qu’il n’y a point de mots déshonnêtes, ni de paroles sales & honteuses ; car ou l’infamie vient des choses, ou elle est dans les paroles : elle ne vient pas simplement des choses, puisqu’il est permis de les exprimer en d’autres paroles qui ne passent point pour