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DES
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Qu’ont de grand à mes yeux les succès de ce Roi,
Qui par-tout a semé le désordre & l’effroi ?

Nouv. ch. de Vers.

Désordre, se dit encore de la dissension & de la brouillerie qui arrive entre deux personnes unies. Dissidium, dissensio. Ce jeune blondin a mis le désordre dans ce ménage ; il a brouillé la femme avec le mari. Nous étions en bonne intelligence, & vous y êtes venu mettre le désordre. Souvent le plus léger intérêt met le désordre dans une famille bien unie.

On dit proverbialement d’un homme qui cherche à brouiller les gens les uns avec les autres, qu’il est comme la servante à Pilate, qu’il se plaît dans le désordre.

☞ DÉSORIENTER. v. a. Détourner de l’Orient, ou faire perdre à quelqu’un la connoissance du véritable côté du Ciel où le soleil se lève. Ab oriente detrahere, abducere. Nous étions sans Boussole, la brume acheva de nous désorienter. Il n’a point d’autre usage au propre. Au figuré il signifie, Déconcerter quelqu’un, le troubler, comme s’il ne savoit où il en est, ni de quel côté est l’Orient. Perturbare. Quand on n’est plus en pays de connoissance, on est tout désorienté. Qu’on parle des Loix à un Médecin, de Médecine à un Avocat, ils sont tous désorientés. Un Provincial transporté à la Cour est tout désorienté. Si vous voulez le désorienter parlez-lui de telle chose.

Désorienté, ée. part. Dans la dispute sur la conformité de la foi des Orientaux avec nous touchant l’Eucharistie, M. Alix disoit quelquefois en raillant, que M. Claude son Collègue étoit désorienté.

DÉSORMAIS. adv. A l’avenir, depuis ce moment-ci. In posterum, deinceps. C’est la même chose que dorénavant. La paix est faite, nous seront désormais exempts de crainte & d’alarmes. Il a été si bien châtié, qu’il sera désormais plus sage. Mes défauts désormais sont mes seuls ennemis. Boil.

DÉSORNER. v. a. Inornatum reddere. Oter de l’ornement, de l’agrément, faire qu’il en paroisse moins, faire paroître une chose, une personne moins belle qu’elle n’est. Malgré le soin qu’on prenoit de lui donner des habits qui pussent la désorner ; tout lui séoit. Mlle L’Her. Ce mot n’est point autorisé par l’usage.

DÉSOSSER. v. a. Oter les os de quelque viande, pour la mettre en pâte ou en hachis. Exossare. On lui a envoyé un pâté de deux lièvres qu’on a désossés.

☞ On le dit aussi de certains poissons dont on ôte les arrêtes. Désosser une carpe, un brochet.

Désossé, ée. part. & adj. Exossatus.

DÉSOURDIR. V. a. Défaire une toile ; ce qui a été, ourdi. Telam retexere. Une toile de Pénélope est une toile où l’on désourdit la nuit ce qu’on a ourdi le jour. Il est de peu d’usage.

Désourdi, ie. part.

DESPECEMENT. Voyez DÉPÈCEMENT.

DESPECER. Voyez DÉPECER.

DESPENDRE. Voyez DÉPENDRE.

DESPENS. Voyez DÉPENS.

DESPENSE. Voyez DÉPENSE.

DESPENSER. Voyez DÉPENSER.

DESPENSIER. Voyez DÉPENSIER.

DESPERS. Vieux mot. Inhumain, dur, cruel.

DESPIRE & DESPIRER. v. a. Vieux mot qui signifie mépriser. Despicere. On a dit, dans le même sens, despirer, & despiter. La partie qui diffama & despita. De Baum. Le Tout-puissant leur façon despire. Marot. Un menor de toi ne despire ; pour, ne méprisez pas un moindre que vous.

DESPLIER, Voyez DÉPLIER.

DESPLOYER, Voyez DÉPLOYER.

DESPONSATION. s. f. Promesse solennelle de mariage, fiançailles. Desponsatio. M. Chastelain s’est servi de ce mot en son Martyrologe, tome I, page 527. pour marquer une Fête en mémoire des fiançailles de la Sainte Vierge avec Saint Joseph. Les Religieuses de l’Annonciade célèbrent à l’honneur de la Sainte Vierge quatre Fêtes particulières qu’elles nomment ainsi, les dix Vertus, la Desponsation, l’Invention & le Spasme.

DESPOTAT. s. m. Mot formé du Grec δεσποτεία, seigneurie, autorité, puissance : d’où vient le mot despotisme, autorité absolue, sans bornes : d’où vient aussi le nom & le titre de despote, que prenoient les plus illustres Seigneurs du bas Empire, & quelques Princes souverains, tels qu’étoient les despotes de Valachie, de Servie & quelques autres. Voy. les mots suivans.

Despotat. s. m. Pays, Etat gouverné par un Despote. Ditio Despotæ subjecta. On appelle en particulier le Despotat, un petit pays de Livadie qui appartient aujourd’hui au Turc, & qui est l’ancienne Etolie. Il est sur la côte de la mer Ionienne, entre le Golfe de Lépante & celui de la Prévésa, & a été nommé Despotat à cause des Despotes, ou Princes Grecs à qui il a appartenu. Corn.

DESPOTE. s. m. Titre d’honneur, & qualité qu’on donne aux Princes de Valachie, & à quelqu’autres Princes voisins. Dominus, Princeps. Ce mot, dans sa première origine, signifie ce que marque en Latin, le mot herus, & en François celui de maître par rapport aux serviteurs. On en fit à-peu-près (sur les médailles) ce que les Latins avoient fait du mot Cæsar, comparé à celui d’Auguste, ΒΑϹΙΛΕΥϹ répondant à Augustus, & ΔΕϹΠΟΤΗϹ à Cæsar. Ainsi Nicéphore ayant fait couronner son fils Stauracius, il ne voulut que le nom de ΔΕϹΠΟΤΗϹ, laissant à son père, par respect, celui de ΒΑϹΙΛΕΥϹ. Ce fut justement au temps que les Empereurs cessèrent de mettre des inscriptions Latines. Cette délicatesse néanmoins ne dura pas, les Empereurs suivans ayant préféré la qualité de ΔΕϹΠΟΤΗϹ à celle de ΒΑϹΙΛΕΥϹ comme Constantin & Michel Ducas, Nicéphore Botoniate, Romanus Diogènes, les Comnènes & quelques autres. A l’imitation des Princes, les Princesses en prirent aussi le nom ΔΕϹΠΟΙΝΗ, comme Théodore, femme de Théophile. P. Joub. Les pensées du p. Hardouin sur le Despote, dans ses Médailles du siècle de Constantin, p. 255 sont ingénieuses & singuliéres. Id.

C’est l’Empereur Alexis, surnommé l’Ange, qui créa la dignité de Despote, & qui lui donna le premier rang après l’Empereur, au-dessus de l’Auguste ou Sébastocrator, & du César. C’est Phranzès qui nous l’apprend, L. I, C. I. Les Despotes étoient ordinairement les fils ou les gendres des Empereurs. Le Despote étoit Collégue de l’Empereur, ou son héritier présomptif. Le Despote fils de l’Empereur, avoit le pas sur le Despote gendre de l’Empereur. Codin p. 38 décrit les habits & les ornemens du Despote. Voyez les Notes du P. Goar sur cet Auteur, p. 20. &c. Sous les successeurs du Grand Constantin on appela despotes de Sparte, les Princes fils, ou frères de l’Empereur, à qui l’on avoit donné la ville de Sparte, ou de Lacédémone, en apanage. On donna le nom de Despotat à la forme du gouvernement. La Guil.

Ce mot vient du Grec δεσπότης, & signifie Maître ou Seigneur.

☞ Le mot de Despote se prend souvent aujourd’hui pour un Prince dont le pouvoir est absolu, qui n’a d’autre loi que sa volonté.

DESPOTICITÉ. s. f. Pouvoir despotique ; absolu. M. de Beauchamps considère le Parterre dans Athènes, dans Rome & en France. Ceux qui parmi nous remplirent le Parterre, se crurent, dit-il, aux droits des Grecs & des Romains, & se mirent à exercer la même jurisdiction, avec plus ou moins de despoticité, selon qu’ils furent plus ou moins frappés des défauts ou des beautés des pièces. Ob. sur les Ecr. Mod. Despotisme est plus en usage.

DESPOTIQUE. adj. m. & f. Souverain absolu. Sum-