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férent. Il n’y a point de dialecte commun, ni de langue commune. Ménage. Les divers dialectes d’une même langue se moquent les uns des autres. Scaliger. Son dialecte est tout-à-fait Ionique. La Motte le Vayer, parlant d’Hérodote. Ce fut dans Samos qu’Hérodote se forma au dialecte Ionique. Id. On trouve des exemples du même genre dans la Grammaire de M. l’Abbé Régnier, & dans les lettres imprimées de M. Huet.

☞ Ce mot dialecte est composé du Grec λέγω, dico, & de la préposition διά.

Dialecte Sacrée, s. f. Nous apprenons d’un passage de Manéthon, qu’il y avoit non-seulement des lettres & caractères sacrés, mais aussi un dialecte ou langage sacré. Car ce que Manéthon appele ici dialecte sacrée, ἱερὰ διάλεκτος, dans un autre endroit, où il interpréte un mot de cette dialecte, il l’appelle langage sacré, ἱερὰ γλῶσσα. Selon Monsieur Warburton, la dialecte sacrée étoit un langage que les Prêtres Egyptiens s’étoient formé, & un des derniers expédiens qu’ils avoient trouvé pour se réserver à eux-mêmes leurs connoissances. Je conçois que la Dialecte sacrée s’est formée, en donnant aux choses le nom de celles qui représentoient les figures hiéroglyphiques. Par exemple, Yk signifioit un Serpent dans la langue Egyptienne ; & la figure d’un Serpent, dans les Hiéroglyphes, marquoit un Roi ; Yk, signifia un Roi dans la dialecte sacrée, comme le dit Manéthon. C’est ainsi que leurs Hiéroglyphes devinrent un fond pour une nouvelle langue toute entiére. Essai sur l’Hist. Hiéroglyphique, p. 175.

DIALECTICIEN. s. m. Qui sait, ou qui enseigne la Dialectique, qui raisonne juste & sans sortir des principes. Dialecticus. On dit plus ordinairement Logicien.

DIALECTIQUE. s. f. Logique, ou l’art de raisonner avec justesse, sçience qui perfectionne le raisonnement. Dialectica, dialectice, ratio disserendi. La Dialectique parmi les Grecs n’étoit qu’un art de chicaner sur tout, & de se servir de sophismes plutôt que de raisons. S. Evr. Avec les détours de vos argumens, & les adresses de la Dialectique, vous mettez la vraisemblance à la place de la vérité. Id. La Dialectique nous tend des lacets. Boss. Aristote est le plus excellent Auteur pour la Dialectique, & celui qui l’a le plus perfectionnée. Zénon d’Elée, ou Eléates, fut le premier qui trouva cette suite naturelle de principes & de conséquences, dont il forma un art en forme de Dialogue, qui pour cet effet fut appellé Dialectique, & alors on cessa de traiter en vers la Philosophie.

Ce mot de Dialectique vient de Dialectica, en Grec Διαλεκτικὴ, mot formé de διαλέγομαι, qui signifie raisonner.

DIALECTIQUEMENT. adv. En Dialecticien. Dialectice, dialecticorum more. Il a prouvé son dire oratoirement, & non pas dialectiquement.

DIALIES. s. m. & pl. Sacrifice que faisoit le Flamen Dialis. Dialia. Ce n’étoit pas tellement une nécessité que les Dialies fussent faites par le Flamen Dialis que d’autres ne pussent les offrir. On voit même dans Corn. Tacite Annal. L. III. C. 58. que s’il étoit malade, ou retenu par quelque fonction publique, les Pontifes prenoient sa place. Struvius, Antiq. Rom. Sym. C. XII. p. 611.

DIALIS. adj. Terme d’Antiquaire. Ce mot est purement Latin, & signifie, qui appartient à Jupiter, de Ζεὺς, Δίος : mais tout Latin qu’il est, nous ne saurions nous dispenser de nous en servir en parlant de l’Antiquité ; car d’appeler le Flamen Dialis, Prêtre de Jupiter, c’est parler d’une manière trop vague, & qui ne marque pas assez celui que les anciens Romains appeloient ainsi : mais aussi il ne faut s’en servir que dans cette occasion. Voyez Flamen. On pourroit dire aussi Dialis, tout court, comme on le dit en Latin. Jamais il n’étoit permis au Dialis de jurer.

DIALOGISER. v. n. Faire des dialogues. Dialogos facere. Il ne se dit que dans l’Ecole, ou plutôt ne se dit point.

DIALOGISME. s. m. Manière ou espèce de dialogue, qui se dit particulièrement des discours faits par interrogations & réponses. Dialogismus.

DIALOGISTE. s. m. & f. Celui ou celle qui fait un dialogue avec un autre. Quel est le dialogiste de cette fille ? Cinquième Lettre Théologique. Les Anciens ont été de grands dialogistes. Xénophon étoit disciple de Socrate, & compagnon d’école de Platon, ainsi il ne faut pas s’étonner s’il a été harangueur & dialogiste. Huet.

DIALOGUE. s. m. Entretien de deux ou de plusieurs personnes, soit de vive voix, soit par écrit. Dialogus. Ils ont fait cent dialogues ensemble, & ils n’ont rien conclu. Une mère doit prendre garde à ces longs dialogues que les galans font avec leurs filles. Les Anciens ont écrit la plupart de leurs Traités en Dialogues. Les Dialogues des Bergers sont fréquens en Poësie, & on les nomme Eglogues. Les Dialogues de Lucien, d’Erasme, &c. Les Dialogues des Morts de M. de Fontenelle, ont été admirés de tout le monde.

M. de Fénelon, Archevêque de Cambray, a peint admirablement le pouvoir & les avantages du Dialogue dans le Mandement qui est à la tête de son Instruction Pastorale en forme de Dialogue. Voyez ci-dessous au mot DRAMATIQUE. Si l’on doute du grand pouvoir de l’art du Dialogue, on n’a qu’à se ressouvenir des profondes & dangereuses impressions que les Lettres à un Provincial ont faites dans le public. L’auteur s’y est servi du jeu du dialogue pour inspirer les préventions les plus sérieuses. Il donne à une erreur affreuse je ne sai quoi de touchant & de gracieux. Fénel. Le S. Esprit même n’a pas dédaigné de nous enseigner, par des dialogues, la patience dans le Livre de Job, & la parfait amour de Dieu dans le Cantique des Cantiques. S. Justin, Martyr, a ouvert ce chemin dans sa Controverse contre les Juifs, & Minuclus Félix le suit dans la sienne contres les Idolâtres. C’est ainsi qu’Origène a cru ne pouvoir mieux réfuter l’erreur de Marcion. Le grand S. Athanase n’a cru rien diminuer de la majesté des mystères de la Foi, en la soutenant par la familiarité de ses dialogues. S. Basile a choisi ce genre d’écrire, comme le plus propre pour nous donner ses Règles qui ont éclairé tout l’Orient. L’art du dialogue a été excellemment mis en œuvre par S. Grégoire de Nazianze, & par son frère Césaire, pour les hautes vérités. Sévère Sulpice n’a pas craint de publier par des espèces de conversations les merveilles de la solitude. Un volume de S. Cyrille d’Alexandrie est presque tout rempli de dialogues, où il explique les vérités les plus dogmatiques sur l’incarnation. Le mystère de J. C. a été traité de même par le savant Théodoret. S. Chrysostome n’a point trouvé de tour plus éloquent que celui-là pour faire sentir l’éminence & le péril du sacerdoce. Qui est-ce qui ne connoît pas le beau dialogue où S. Jérôme réfute si puissamment les Lucifériens ? Nous admirons tous les jours les dialogues sublimes de S. Augustin, & principalement ceux du libre arbitre, où il remonte à l’origine du péché, contre les Manichéens. La tradition des Solitaires du désert éclata dans les Conférences de Cassien, qui ont répandu la même lumière dans l’Occident que l’Orient avoit reçue de S. Basile. Le grand S. Grégoire Pape a cru le dialogue digne de la gravité du siège Apostolique, pour publier les merveilles de Dieu. Les Dialogues de S. Maxime sur la Trinité sont célèbres dans toute l’Église. S. Anselme montre la force de son génie dans les siens sur les vérités fondamentales de la Religion. Tous les siècles sont pleins de semblables exemples. Id. Les Dialogues de M. de Cambray ne seront pas moins chers à la postérité, que ses admirables défenses de la Religion. Mem. de Tr. L’antiquité profane avoit aussi employé l’art du Dialogue, non-seulement dans les sujets badins