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de guerre, je n’ai plus de bien. Quæ summa militum injuria est.

Cet homme vit selon Dieu. Secundùm Deum. Cela est selon Dieu & raison. On appelle un Saint, Homme de Dieu. L’homme de Dieu souffre tout sans se plaindre. Un homme selon le cœur de Dieu, c’est encore une périphrase, qui signifie un Saint. Ces deux dernières expressions sont prises de l’Ecriture, premier L. des Rois, II. 27. quatrième L. des Rois IV. 25. 27. 40. 42. &c. & premier L. des Rois XIII. 14. &c. En général c’est un usage de l’Ecriture d’ajouter le nom Dieu à un mot, quand en veut signifier que la chose signifiée par ce mot est excellente, parfaite dans son genre. Ainsi Ps. XXXV. 7. Des montagnes de Dieu, c’est-à-dire, de hautes montagnes. Ps. XXXIX. II. Des cèdres de Dieu, sont des cèdres beaux & grands. Premier L. des Rois XIV. 15. une terreur de Dieu veut dire une terreur épouvantable. Gen. XXX. 8. des combats de Dieu, ce sont de grands combats, rudes, difficiles, &c. Quand le nom est adjectif, l’Ecriture se sert devant le nom Dieu de la particule ל, qui signifie eu égard, par rapport. Ainsi, Jonas III. 3. Ninive étoit une ville grande à Dieu, eu égard à Dieu même, par rapport à Dieu, au jugement de Dieu même : cela veut dire une très-grande ville. Nous imitons quelquefois ces expressions dans notre langue en matière profane ; car on dit quelquefois, venez dîner chez moi, j’ai du vin des Dieux ; cela signifie, d’excellent vin.

En matière de souhait, Dieu le veuille, plût à Dieu. Faxit Deus, utinam. A Dieu ne plaise. Dieu m’en garde. Quod Deus avertat. Dieu vous assiste, Dieu vous benisse, Dieu vous garde de mal, Dieu vous veuille bien ouïr. Adsit tibi Deus, Deus te adjuvet. Dieu vous le rende, Dieu vous conserve, Dieu vous conduise.

Il vous salue,
D’un Dieu vous soit en aide, alors qu’on éternue. Mol.

On dit aussi, Dieu aidant ; pour dire, s’il plaît à Dieu. Deo juvante.

En matière de conjuration & d’affirmation. Pour l’amour de Dieu. Au nom de Dieu. Per Deum. Bon Dieu. Bone Deus. Juste Dieu. Sur mon Dieu : je prends Dieu à témoin. Ita me Deus adjuvet. Dieu sait si j’ai fait cela à mauvaise intention. Croix de par Dieu. Voyez Croix. Allez de par Dieu.

En matière d’exclamation, on dit, bon Dieu ! qu’est ceci ? Bone Deus ! o Deus ! Bon Dieu ! qui l’auroit cru ? Saint Jean, dans son Evangile, nous ouvre des routes toutes nouvelles ; mais, bon Dieu ! avec quelle élévation & quelle force ! Pélisson. On dit aussi, mon Dieu ! je vous connois. Mon Dieu ! Mon Dieu ! s’écrioit l’un, la pièce est merveilleuse. Vill.

En matière de salut, Dieu vous garde, Dieu soit avec vous, bon jour & adieu, adieu jusqu’au revoir. Salve, vale. Dieu vous ait en sa sainte garde : c’est la formule avec laquelle le Roi finit les lettres qu’il écrit à ses sujets. Les Princes souverains s’appellent Rois par la grâce de Dieu. Dei gratiâ. Et disent qu’ils ne relèvent que de Dieu & de leur épée. Ainsi c’est une formule de toutes les lettres de Chancellerie. Louis, par la grâce de Dieu, &c.

On appelle la cause de Dieu, la défense de l’Eglise, & des choses sacrées, celle de son nom & de sa gloire, & aussi celle des pauvres & orphelins, & autres qui sont sous sa protection. Jus Dei.

Dieu, se dit aussi des faux Dieux de la Gentilité, Créatures auxquelles on rend, ou l’on a rendu les honneurs de la Divinité. Idole, image de quelque créature, à laquelle on rend un culte qui n’est dû qu’à Dieu. Deus, falsus Deus, Idolum. Les premiers faux Dieux qu’on ait adorés, sont les Astres, le Ciel le Soleil, la Lune, &c. ensuite la terre, qui fournissoit les fruits qui servent à la nourriture de l’homme & des animaux, le feu si utile à la vie, &c. Dans la suite, ces Dieux se sont multipliés à l’infini par le caprice de leurs adorateurs. Chaque peuple, chaque province, chaque ville, s’est fait des Dieux particuliers à sa fantaisie. Pour autoriser le crime, & justifier ses débauches, on se fit des Dieux criminels & débauchés, des Dieux injustes & violens, des Dieux avares & voleurs, des Dieux ivrognes, des Dieux impudiques, des Dieux cruels & sanguinaires.

Les principaux Dieux, qu’on nommoit les grands Dieux, étoient Jupiter, Junon, Apollon, Diane, Vulcain, Venus, Mars, Minerve, Neptune, Vesta, Cérés & Mercure. On dit, le Dieu du Ciel, le Dieu de la mer, le Dieu des vers, le Dieu de la Poësie, pour marquer les choses auxquelles ces Dieux présidoient. Saturne étoit le Dieu du temps, Jupiter le Dieu du Ciel, Neptune le Dieu de la mer, Pluton le Dieu des enfers. Le Dieu de la guerre étoit Mars ; celui de l’éloquence, de la poësie & de la Médecine, Apollon ; Mercure le Dieu des voleurs ; Bacchus le Dieu de la vigne & du vin ; Pan le Dieu des Bergers ; Cupidon le Dieu de l’amour & de la volupté ; Esculape le Dieu de la Médecine ; Janus le Dieu du labourage ; Vulcain le Dieu du feu & des forgerons, le Génie le Dieu de la naissance ; les Pénates étoient les Dieux de la famille, & les Lares les Dieux du foyer ; Jugatinus le Dieu du mariage ; Domiducus le Dieu des nôces ; Silvain le Dieu des bois ; Vertumne le Dieu des saisons ; Priape le Dieu des semences ; Mithra étoit le Dieu des Perses ; Dagon le Dieu des Philistins ; Isis, Serapis, Osiris, Anubis, Dieux des Egyptiens ; Hercule Dieu des Tyriens, Thor Dieu des peuples du Septentrion ; Xaca & Amida sont les Dieux du Japon ; Wisnou le Dieu des Indes, & Foe un Dieu de la Chine.

Tous ces Dieux des Gentils sont 1o. des Esprits créés, Anges ou Démons. De là les bons & les mauvais Dieux, les Génies, les Typhons, les Dieux protecteurs, les Dieux ennemis, les Dieux infernaux, &c. 2o. Des corps célestes, comme le Soleil, la Lune, les autres Planètes, les Etoiles fixes, les Constellations, &c. 3o. Les Élémens, comme l’Air, la Terre, l’Océan, Ops, Vesta, les Fleuves, &c. 4o. Les Météores. Les Perses adoroient le vent ; le foudre & le tonnerre étoient honorés sous le nom de Géryon ; & plusieurs peuples des Indes & de l’Amérique en font aussi des Dieux. On a aussi donné la divinité aux Comètes, témoin celle qui parut vers la mort de César. Castor, Pollux, Hélène, Isis, sont encore des météores. Socrate divinisa les nuées, si nous en croyons Aristophane, & l’on fit aux Chrétiens le même reproche, dit Tertullien, Apolog. C. 14. 5o. On fit des Dieux des Minéraux ou Fossiles, tel étoit le Bætyle, dont nous avons parlé en son lieu. Les Arabes, les habitans de Possin, ou Possène, les Finlandois ont adoré des pierres. Les Scythes tenoient le fer pour un Dieu. L’Or & l’Argent ont aussi passé pour des Dieux. 6o. On en a fait des plantes. L’ail & les oignons étoient des Dieux en Egypte. Les Sclaves, les Lithuaniens, les Celtes, les Vandales, les Indiens, les peuples du Pérou, ont adoré les arbres & les forêts. Les Gaulois, les Germains & les Romains avoient beaucoup de vénération pour les chênes. C’étoit le froment, le blé, les semences, que les Anciens honoroient sous les noms de Cérès & de Proserpine. 7o. Ils prenoient des Dieux dans les Eaux. Les Syriens sur-tout, & les Egyptiens, adoroient des poissons. Voyez ci-dessus Atergatis, Dagon, Derceto. Les Oxyrinchites, les Latopolitains, les Sienites, les habitans d’Eléphantine, avoient chacun leur poisson pour Dieu. Les Tritons, les Néréides, les Syrènes, qu’étoient-ce autre chose que des poissons ? Plusieurs nations ont adoré les serpens ; par exemple, les Egyptiens, les Borussiens, les Samogites, les Lithuaniens. 8o. Les Insectes, comme les mouches, les fourmis, ont