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di’s iMUiaiAMF.M A :ill, 1, p. ’illî’ si|.) oui coiisorvi’ le sou- venir, il n’esl pas douteux qu’il est de nature identique et qu’il représente comme eux l’une des plus anciennes personnilicalions de la religion agricole des Romains. Le nom même est, à ce point de vue, caractéristique ; il peut, en elTel, être rapproché de Pilumnus,de Picumnus, de Vitumnus, et pourrait avoir été formé de verlere comme alumnus de alere : celui qui chanije ; c’est-à- dire qu’il est vraiment latin et italique’. Cependant, la tradition veut que ce dieu ait été d’origine étrusque ; Varron le considère même comme le dieu principal de l’Ktrurie - ; à Rome, sa plus ancienne image était érigée dans le l’/c(/.s- Tuscus. Il était également en honneur chez les Latins et les Sabins. Non seulement à Rome, mais dans les pays d’où les divers éléments de la popu- lation primitive de Rome étaient originaires, on Iho- norail comme le dieu des arbres fruitiers, apparenté par sa nature à Pomone et àCérès ; parmi les dieux à qui le roi Sabin T. Tatius érigea des autels à Rome figurait Verlumnus^ La forme latine du nom corres- pond h la notion de Vannus cerlcns ; et l’action du dieu fait la transition entre les dernièrtvs récoltes de tuut genre et le début de l’année nouvelle ’. Mais sa nature protéiforme l’a fait considérer comme une personnifi- cation qui préside aux saisons de l’année en général. L’étymologie se prête à cette dernière interprétation ; la fable du dieu invite à préférer la première.

Une tradition conservée par Servius fait de Vertumnus un dieu d’origine romaine, mêlé à l’ancienne religion du Tibre [tibeiunls, p. 298’, dont il aurait détourné le cours : Tiberis, (inler/uam Verlumno faclis sacri/iciis avcrleretur....’ Cette légende, qui n’eslpeut-èlre qu’une fantaisie inspirée par la nature changeante du dieu, se mêle à celle des Jumeaux, du Lupercal et du fleuve surnommé Jtumon, nourricier. Les poètes du temps d’.Xuguste, à part Virgile, l’ont tous plus ou moins exploitée. Tibulle, pour détinir une beauté qui renou- velle sans cesse ses charmes, rappelle Vertumnus, qui jouit dans l’Olympe du bonheur perpétuel, passant par mille formes diverses, toutes également ravissantes °. Properce explique son nom par la variété inépuisable de ses aspects, après l’avoir fait remonter à l’exploit par lequel le dieu réussit à changer le cours du Tibre ; tel est aussi le cas d’Ovide. « Ma nature, lui lait dire Properce, est susceptible de revêtir toutes les formes ; quelle que soit celle qu’on me prête, elle ne va jamais sans la beauté ’. "

Par cette faculté de se transformer à l’infini, Vertum- nus ressemble à Protée, avec celte diflërence que jamais il ne prend des aspects laids et terrifiants. Kn revanche, on lui prête des rôles et des figures vulgaires ; non seu- lement il change le cours des lleuves, mais il se fait marchand, le propre du négoce étant l’échange (^t aussi

VERTUMNUS. — I llarluiig, IMigion der Itoemei ; II, p. 13i. Cf. Corsscn, .■liMj/)riic/ie, l|2, p. 170 sq. — 2 Ling. lai. V, « et 7t-, Dion. liai. Il, 50 ; cf. 0. Miicllcr, K rasker, II, p. SI sc|. Pour le vtinuiiMus (■lriis(|ue, /tiid. Il, Siii A, lig. i77i ; ; Ainbroscli, SluUUn, p. iOU, iioli ; 57 ; l’rcllci-JoriUn, ItOLin. Uylhol. 1, |i. ijl . - 3 Ascoii. ad Cic. Verr. Il, I , .ïO ; l’orpli. ad llor. Epist. 1, 20, 1 ; Aug. Cir. D. IV, :i’1. Il n’y a pas à Icnir comi>lc d’un lexle de Fulgciicc, Exp, anl. Sa’m. -ii ; abitlr. sei’m. p. iJGl.où VcrUimniis csl avec Epona cl Pfiapc mis an nombre des Scmonct. — ’ l’rop. V, S, Il ; iôid. 47. — ô Scrv. ad .Icn. VIII, 90 ; l’rop. V, 2, 10 ; Ov. Easl. VI, i03. — <•• Tib. IV, 2, U ; Uv. East. VI, 409. — ’ loc. cit. V, 2, 1 ; il, Ole. — » Coluni. X, 308 ; Slarl. XI, 27, II. — » Sal. Il, 7, 14 : Vertumnis, qnotijuot avnt,natus inii/uis ; et le cunimcnlalcur, Episl. I, 20, 1 : Vcftumtius Unis csl praetes vertiindarum rcrn»i, h. e. enteniittrunt vt vendendarmn, ^ni in vico liirario saecUuttt habtiil. — 10 Prop. /. c. 35 : est eliam aiifigae species Vertumnus et ejus, Trajicil allerno v" ’**t pondus fquo. — u l'roU^c >e défend

la transformation des marchandises Ou expliquait par là que son sanctuaire s’élevât dans le l’irus Tuscus, plein de boutiques en tout genre. Horace, tournant en ridicule quelque personnage incohérent et versatile, ilit (ju’il a beau changer, il restera toujours absurde, comme si ces avatars étaient l’effet de mille Vertumni acharnés sur lui : Verlumnis, quolf/uol sunt, nalus iniquis^. Properce, qui a composé en l’honneur du dieu une de ses meilleures élégies archéologiques, nous dit que les DKsi^LTOHES (II, p. 113) l’ont pris comme patron et que pour cette raison on les appelait l’erlumni ’". Dans ce même morceau le dieu prend à volonté toutes les personnalités, toutes les formes : il est homme ou femme, faucheur, soldat, moissonneur, buveur à la façon d’un des suivants de Bacchus ; il prend de même la figure d’Apollon, se change en chasseur, pêcheur, oiseleur, marchand, berger, fleuriste et jardinier. En un mot, il est un Protée familier, partageant avec ce génie maritime les facultés prophétiques et ne cédant (lu’à la violence, quand on lui demande de rendre des oracles ".

Vertumnus, d’autre part, ofl’re des traits de ressem- blance avec siLVANL’s, comme nous l’avons fait remar- (juer ailleurs (IV, i, p. 1345). Rien de surprenant qu’un dieu, dont l’être exprime surtout le changement, soit aisé à confondre avec d’autres ligures’-. Vertumnus fait penser au génie protecteur des bois, lorsqu’il exerce 1( ! métier de faucheur : « Donne-moi une faulx et ceins ma tète d’un rouleau d’herbes séchées’" ! » C’est pour cette raison que nombre de figures de Silvanus ont été à tort considérées comme représentant Vertumnus". Ovide ne pouvait manquer de donner à Vertumnus une place d’honneur dans ses JJélamorp/ioses ; l’épisode où il raconte son roman d’amour avec Pomone compte parmi les plus heureux du poème (IV, p. o’t", 1) ’ Il est d’ailleurs probable que le dieu ombrien Puemunus, de- venu l’umonii ; chez les Sabins.a été absorbé dans la per- sonnalité populaire de Vertumnus. De même celui-ci a été confondu avec Volturnus, d’autant plus aisément que l’or- thographe archaïque du premier nom est Vortumnus’".

Le plus ancien culte de Vertumnus à Rome est à chercher dans le Vicus Tuscus, où était érigée son image ; il parait avoir eu un sacellum sur l’.Vventin ; on lui ofl’rail des sacrifices le 13 août, date caractéristique, puisqu’elle marque le début de la maturité pour les fruits d’automne ’I1 ne semble pas que ce culte soit sorti d’Ita- lie. Les inscriptions nomment Vertumnus en compagnie de Cérès ; une seule jusqu’à présent le signale aussi en IJgurie ’*. La statue archaïque qui le représentait, à Rome, se dressait au point de séjniration du Vélabre et du Vicus Tuscus ; Tile-Live en fait mention pour désigner l’emplacement de la maison de P. Scipion l’Africain en

l’avenir chez Virg. Geonj. IV, 3S8 sq. ; de nidnio Vgrltnnuus, cliei Ov. J/elnin. XIV, 042 sq. Tropercc, t. c, fait à peine une allusion discrète au pouvoir prophétique du dieu. Cf. Grinini, nculscltc A/ythol. 1. p. 360, n. 3, el III, p. 121. yuant au mariage de VcrUininus avec l’om ine, qui, chez Ov.ilc, a un faux air de légende populaire, il csl pruhalilcnienl de l’invention du poète. V. Wissowa, /Icligion und h’ullus, p. It ;:>. — I- Ov. /■’ast. VI, 409 : conienicns divertis iste fii/aris... — ’3 Prop. V, 11, 25. — 1’ V. silvasu», l. c. notes 4 et 6 ; cf. ibid. I3V2 cl 1313. Cf. Anniiti deW Instiliito, 1SG6, p. 212 sq. note 2 (/majini dei dio Siloano, par RcilTirschcid) ; le lexle d’Ovide, Mêlant. XIV, 023 sq. ; 705, 771 ; et li4l-6Dl). — >» Cf. l’riller-Jordan, floem. Mythol. I, p. 433. — <6 MommseD, Corp. inscr. lai. I, ISJ : cl larl. pomun», /. c, III, 517 A. — f- Corp. inser. lai. I,p. 399(Kal. Capran, Amil.) cl Ikckcr, Uandbuch, I, p. 1,430, 454,4(13. Cf. Corp. inscr. lat. VI, 9393 elS04. — >» Mommsen, /nscr. Regni ieapol. 373, 630 ; cf. 373 ; el Orelli-llenien. 571S. L insrriplionde Scgusio en Liguric, C. inscr. lat. V, 7235.