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le même foyer devait servir aux sacrifices et à la prépa- ralion des repas. Zeus y avait sa place en qualité d’Éd- T !oO/o ; ou d’l-aT[.oq, àcoté d’IIestia elle-même. Le maître de la maison ’IdTio-îfjKov chez les Doriens et les Éoliens) remplissait les fonctions sacerdotales. De plus on accé- dait à l’habitation la plus anciennement connue des Grecs par un espace à ciel ouvert, où se dressait un autel en Thonneur de Zeus eoxeioç, gardien de l’enclos ; de là on pénétrait dans le vestibule, où était le foyer qui menait à l’habitation proprement dite. C’est ce vestibule qui était le sanctuaire d’Ilestia, lorsque sa religion est arrivée à son plein développement’. C’est alors qu’elle eut son siège et dans les demeures illustres des dieux et dans les maisons les plus modestes des hommes. .V elle s’adresse la première comme la dernière libation accompagnant le sacrilice. C’est sous l’inlluence de cette religion que la fable atlribue à la déesse la construction même des maisons. Chez Sophocle, Chryso- Ihémis jure sur le foyer paternel : la tombe qu"{Edipe errant trouve aux portes d’Athènes est appelée son foyer souterrain, et Delphes, chez le même poète, est appelé le foyer des oracles-. L’idée même du foyer se diver- silie et s’élend à toute résidence qui, œuvre de l’homme, est le centre d’un groupement ou familial ou politique. Les colonies se détachent de la mère patrie en emportant le feu allumé sur son auteP ; l’IIestia de la colonie est la liliale de celle de la métropole. Il arrive même que, dans un centre colonisé, le mélange de plusieurs iu-ixi venues de villes diverses grandit l’importance de leur ville ainsi fondée ^ Aussi Heslia divinité devient-elle fondatrice de cités ; Aegéesest le foyer de la monarchie macédonienne, Halicarnasse celui de la Carie, Séleucie celui de la dynastie des Séleucidcs. Certaines cités aspi- rant au titre de capitales sont dénommées ’la-ziatx ou ’EiTTiaia ; Naukratis d’Egypte célèbre la fêle de l’Hestia ■TîsuTavïTi ;, en souvenir de ses origines grecques

Durant la plus ancienne période du sijnœcisme, les quartiers encore indépendants d’une même ville avaient chacun leur foyer ou leur Prylanée. Thésée fait l’unité d’Athènes en réunissant en une seule toutes les pryta- nies de l’Attique ; de même Xuma celle de Rome, en centralisant les 30 curies dans la liegia, sanctuaire de Vesta. Les Tégéates revendiquent pour leur ville le litre de foyer commun (xotvïi ’EiTia) des .Vrcadiens ^. Une commune ou une communauté bien ordonnée est une

  • Dans i’fidijssée dôjà (VU. I5 ;i), Xaiisicaa engage Llysse à aller trouver

sa mère auprès du foyer : îk’ Î5 ;[âoT. sv -jah^ ««7 ?. : on mdinc lenips que le héros preud à témoin de sa véracité Zeus le plus grand des dicuK, il s’adresse à la laide hospitalière et au Toycr de sa propre maison. Les anciens Romains Tai- saient dériver t’estiltuitim de Vesta ; v, Serv. Acn. VI, i73 : a Vcstn dictum per imminutionem ; tiam Veslae limen consecrattim est. — 2 y. Aesch. Atjam, 105fi ; rio-tîa ^ivé^=a>.o ; est l’autel placé au centre du vestibule ; cf. Eurip. Herc. Fur. ^ii : Uif« iii>><, cl le fragment d’Eschyle, éd. Ilermann, 3i3, 3. La ^it^v» irr’ci se confond plus tard avec l’autel domeslii|ue : cf. Preuner, Op. I. p. 88 st|. L’autel de Zeus Hcrkeios est distinct de celui d’Ilestia. où se faisait le sacrifice à Zeus Hpheslios {Epistios en ionien). Heslia, au point de vue du sacrifice, esl sur le même rang que Zeus et même elle le devance : v, encore les vocahles i^Ttàva ; et ivTtftJ/o ;. A Olympie, on sacrifiait à llcs(i.- d’abonl, à Zeus ensuite ; fans. V, 14. 5. i :hei Euripide {Hrrc. Fur. 599), Ihole dit à llèrakiès en l’accueillant : En arri- vant inroffut ! (i’ahord Ifestia ; à quoi le héros répond : Je ite mangu^rai pas d honorer les dieiut du reslibule (-.«j ; «oTi oti>« ;)- Cf. chei Uscner, /n»cr. Gr. ifted. p. CO, n" 67, oîi il est question d’un sacrilice puhlic : tIj ’Kot^ii xat T»Tt âUoi ; ti.t ;. — 3 Soph. Eleclr. 881 ; Oed. fl. 903 ; Oeil. Col. I7SI ; llcrod. 1, 146 ; Etijm. .M. xçuto.iTn ; Schol. Aristid. p. 48 l). — 4 C’est le cas de Uélos, Heslia desCyclades : Callim. Del. 3i3. Lcranos y empruntait le feu sacré. Cf. Plat. Crit. ia9c. — 5 Corp. inser. graee. S534 ; S53S ; 5367. Ennius [frngm. Viihlen, p. 174) dit de Cnossos qu’elle a été fondée par Vesta. Pour Naukratis, v. Allien. IV, ii. Le foyer émigré avec les colonips ; Pans. V, 13, 5 ; l’oit. I, 7 ; llcrod. 1, I iC :

famille ; toute famille a sa raison d’être dans son foyer. L’État dans son ensemble a un foyer propre, centre et synthèse de tous les foyers particuliers . Celle xoiv-q é(7TL’a a son siège au Frytanée, édifice où réside le premier magistrat et où il faut chercher le centre à la fois religieux et politique de la cité. Heslia est reine au Prylanée : son titre le plus éminent esl d’être npuTaveîa ou ripiiTavïTtç. Là le soin des sacrifices offerts au nom de la collectivité est dévolu, non à des prêtres proprement dits, mais à des .Xrchonles. Rois ou Prytanos, qui tenaient leur dignité des fonctions qu’ils remplissaient auprès du foyer commun ’. Heslia au temple d’.XpoUon à Delphes était, pour toutes les nationalités helléniques, comme le foyer commun de la Grèce, de même que Vomplidlos en élait le centre lopographique. Après la bataille da Platées, l’oracle ayant prescrit d’éteindre tous les feux que les barbares avaient souillés, on les ralluma en recourant au foyer de Delphes, que la guerre avait épargné".

Source de toute vie religieuse, le loyer sacré esl en même temps une suggestion d’humanité. L’exilé, le suppliant, dans l’atmosphère du foyer, a droit à la pitié, à la clémence ’". Rien de plus caractéristique à cet égard que le passage où Thucydide raconte l’arrivée de Thémislocle chez .Vdmète, roi des Molosses. H est accueilli par la reine, qui lui conseille d’attendre .dmèle sVi T’f|V Éu-t’av, et lui met dans les bras un de ses enfants : « Ce n’est pas seulement parce qu’elle esl le centre de la famille qu’Heslia a ce caractère saint el tulélaire, mais parce que le foyer est voué aux dieux en prenant la forme de l’autel, et que la flamme esl celle même du sacrilice". » Ainsi il devient un lieu d’asile. La littérature dramatique exploite fréquemment celle croyance, soit qu’elle montre Œdipe accueilli à Colone par Thésée, ou Ampliitryon sollicitant Licus, comme da.nà ï/fercu le furieux d’Euripide. L’autel où brille la divinité d’Heslia est appelé [ae<jou.i.ï’ao ? par Eschyle, foyer de Zeus par Euripide ; il se confondra plus lard avec celui des dieux domestiques, loul en gardant le nom de ÏG-’.a, par lequel il fait un appel indirect à la divinité vénérable de la famille’-. Partout d’ailleurs, dans ces textes, le sens de àsTi’a oscille entre le nom propre el le nom commun, entre la divinité personnifiée el le foyer qu’elle personnifie. Ce foyer n’est pas seulement l’abri de ses ]>ossesscurs el l’image matérielle de leurs droits

Etym. il. .fu. :.»ir» ; Schol. Aristid. Panath. p. 4S. — !’■ Thucyd. Il, 13 (pour Athènes) ; cf. pour Tégéc, Paus. VllI, 53, 3 : Diod. XXll, 23 ; et ibid. .V, 90 ; Polyb. V. 38, 4. — 7 Schol. Pind. Nem. tt, 1. Cf. Phil. de mundi opif. 1, p. 10 ; Dio Chrys. Orat. 30, 2, p. 100. Cf. Preuner, Heslia- Vesta, p. 95. el chei Roscher, Op. eil. p. Î631. V. pBïTASELsi, IV, I. p. 742 sq. ; avec la note 50, p. 743.

— 8 Aristot. Polit. VI, S, 1 ! ; au temps des rois, l’Iirita de la maison roy.ilc était celle de l’Èlal, Soph. Oed. C’o/. 632 sq., comme à Rome la Vesla du roi dcvini, au tilrc de l’Étal, celle du rex sacrorum sous la République. Cf. Preuner, rhei Roscher, p. 2033, et Preller-Plew, Griech. Mt/thol. 1, p. 343. Pour les iniliations de jeunes enfauts auprès de ces xoivot îa-riai, v. Inscr. T :aT ; as’ îoTÎa ; ^uo’J ;.it«9 ; ; i :«T ; 4j’ i«’ :t’o ; ; Corp. inscr. ait. Il, n"’ 809 ; 828 sq. ; 908 ; 910 sq. et Bœckh, Corp. inser. gr. I. p. 444. V. encore Corp. inscr. gr. 101 ; cl C. i. ait. Il, 289 ; uu îiç’.v Tî ;; ’K<Tîî« ; au Pirée. Comme synonyme de -auT«v(î«> on trouve tt^otvtirov el les Prylancs sont appelés aussi îifiJuTot (à Mcssèue, à Sparte, à Lindosl. — » Plut. .lris/i<(. 20. Cf. Aesch. Ê-um. 282 sq. ; Soph. Oed. Col. 413 ; Eurip. Àndrom. 1067, 1240. Cependant Athènes était appelée aussi :<otvi ; iiniii 'kàSo< : Ael. Var. Uist. IV, 6 ; Athen. Vl.p.25i U ; Plat, /"rofoj. p. 337 : ,îj,- •E’n'niSo ; t !ii !pu :i.>it.» xilî ocsl» ;.

— >0 V. les textes homériques : Od. VI, 301, où Nausicaa engage L’Iyssc à aller trouver sa mère près du foyer, ce qu’d fait ibid. Vil, 153 ; cf. son serment, XIX, 304, el XIV,I38. — 11 Thucyd. I. 130 ; cf. Plut. Them. 24 ; Acsch. Agam. 1056, 1387 ; Eum. 577, 669 ;Su ;)p/. 30S, 503 : Soph. Ocrf. Col. 633 ; Eurip. Hcrc. Fur.ltô ; llerod. I, 33, racontant l’histoire d’Adraste devenu l’l«i«Tiii ; de Crésus et purifié par lui. Les mots isiitm ;, inîitiio ; désignent le suppliant. — i^Preuner, Heslia- ’eslii,p 73.