Page:Dictionnaire des Antiquités grecques et romaines - Daremberg - V 2.djvu/242

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

vie

839

Vie

cuirasses éduens {opifices loricari qui in Aeduis consisHinl), rattachés au ricus de Brira Segnutia {et lico Brirae Segnutiae respondent) ’.

L’œuvre ou du moins Tetlort du gouvernement romain en Gaule fui, autant que nous en pouvons juger, de briser les cadres de l’étal politique ancien et de substi- tuer à la dispersion des pagi des circonscriptions urbaines élroilemenl subordonnées à une ville capitale. Cette évolution apparaît de façon tout particulièrement nette en Suisse. Durant le premier siècle les pagi y représentent l’unité politique et les vici n’y semblent avoir qu’une existence extrêmement effacée. A partir du moment où Vespasien fait à’Aventicum la colonie des Helvètes, nous ne rencontrons plus, au contraire, aucune mention des pagi, tandis que de nombreuses inscriptions nous parlent des vici, de leurs décrets, des édi lices qu’ils construisent et des curateurs qui les admi- nistrent ^ Rattachées directement à. la ville, les bour- gades s’efforcent, dirait-on, de rivaliser avec elle.

Avant Vespasien, la Gaule à peine conquise. César et Auguste y avaient fondé bon nombre de villes dont nous ignorons d’ailleurs le statut^ ; suivant sans doute la même tradition, Claude y avait multiplié les fora aux- quels il avait accordé probablement le droit latin*. La dénomination seule de ces établissements nouveaux : Augusta Suessionum, Auscorutn, Veroinanduorum, Treverorum, Forum Vallensium, Segusiarorum, Cen- Ironuin, etc., suffit à en indiquer la destination. Ils étaient appelés à servir de capitale aux peuplades dont ils portent le nom et par conséquent à grouper autour d’eux, comme auraient pu le faire des colonies, les vici de ces civilales. A en juger par la région de Trêves, dans laquelle les Itinéraires nomment un grand nombre de vici % tandis qu’aucun document ne mentionne de pagus, le territoire dépendant de ces villes devait être organisé comme celui des colonies de Nîmes et de Vienne dans la Narbonnaise.

L’édit de Caracalla, au début du ni’ siècle, accordant le droit de cité à tous les habitants de l’Empire, eut sans doute le même effet, en Gaule et dans les autres pro- vinces, que l’oclroi de la cité romaine aux Italiens à la (in de l’époque républicaine. Il effaçait toute différence entre les habitants des bourgades rurales et ceux des colonies, des municipes ou des villes de droit latin. Sans doute nous ne connaissons pas les modalités et les restrictions probables de cet édit ’ ; il est néanmoins difficile de supposer avec Mommsen qu’il s’appliquât uniquement aux villes à l’exclusion des vici ’. Ne voyons-nous pas en effet, à partir de ce moment, dispa- raître toute distinction entre la ville capitale d’une civitas et la civilas elle-même’ ? La ville perd son nom propre pour prendre celui de la civitas : les citoyens qui y possèdent leur domicile ne l’emportent donc plus, par leur seul titre de citoyens delà ville, sur ceux qui habi- tent le reste du territoire. Le pays des Vivisques tout

• /bid. n. iiiS ; cf. n. 3474 : fabri ferrari Dibione contittentes ; 5473 : tapidaripago Audomo consistente». — 2 Uoninisen, Schweitzer Naehsiudien, dans Bermeê, XVI, p. 443 sq. ; cf. Kornemann, Zur Stadtenstehung, p. 47, 48 ; Cor/,, injcr, (a/. XIU, i, l,p. 7 ; n. 50i6, 5042,5063,3170, 5194, 3|93, 3i33.

— i Cf. G. Bloch, La Gaule indépendante et la Gaule romaine, dans Lavisse, é/iU. de France, t. I. p. 108. — 4 C’esl en effet le droit latin qu’il avait accordé aui fora créés dans les Alpes ; Plin. Nal. hiat. III, 135. — 5 JUn. Antonin. éd. Farthef-finder, p. 365, 366, 37i, 373 ; cf. Corp. inacr. lat. XIII, I, î, p. 5sG.

— 6 Les précisions que l’on croyait pouvoir tirer sur ce point d’un papvrus récemment trouvé (P. M. lleyer, de Gieaaen Pn/njri. Il, 40, p. S9 sq.) sont

entier, par exemple, comme le montre M. Jullian, n’est plus qu’un district de l’État romain, un district qui a Bordeaux pour chef-lieu, mais dans lequel les habitants des vici sont les égaux de ceux de Bordeaux*. Dès lors les circonstances seules, et non plus le droit, établis- sent des degrés entre les villes et les vici, et ces circon- stances — la décadence économique générale dans l’Empire, puis les invasions germaniques — contribuent à concentrer en quelques points choisis toute la vie des campagnes ; les bourgades les plus heureusement situées devinrent des places fortes, tandis que parmi les vici ruinés par la guerre bon nombre durent disparaître à jamais.

La Germanie, conquise et organisée plus tardivement que la Gaule, semble n’avoir connu d’autre unité admi- nistrative que le vicus ; nous n’y retrouvons pas de pagus ’. Sans former de communautés civiles régu- lières, sans posséder la respublica, ces vici jouissent d’une administration propre (voir plus loin : MAGisTiîArs DES vici). Ils imposent eux-mêmes à leurs habitants une discipline et des charges, notamment des charges finan- cières, dont ils peuvent, à leur gré, semble-t-il, accorder l’exonération ’". .insi, près de Mayence, des signiferi remercient les vicani veteres du Caslel des Mattiaques de l’immunité complète qui leur a été conférée". Ces vici germaniques ont leur circonscription, leurs fron- tières (fines) ’-, leur domaine qu’ils administrent eux- mêmes par leur actor praediorum (voir plus loin magis- trats DES vici).

La province néanmoins est divisée en départements plus vastes, en civitates, qui englobent chacune un certain nombre de vici ; mais ces civitates n’ont elles- mêmes d’autre chef-lieu qu’un vicus. Aussi la civitas ou Saltus Semulocennensis doit son nom au vicus qui en est le centre ". La cité des Suebi Nicretes, consti- tuée, semble-t-il, par Trajan, a sa capitale dans la très ancienne bourgade de Lopodunum qui conserve le titre de ric«s ". De même le vicus vicanorum Murrensiutn, au confluent du Neckar et de la Murr, paraît être le centre de la civitas Alisinensis^^. Trajan et Caracalla, en particulier, donnent en Germanie leur nom à des vici ’*, de même qu’en Gaule Auguste avait donné le sien à des urbes et Claude à des fora. Ces villages devaient donc jouer, dans la marche frontière du Limes, le même rôle de centres administratifs que les bourgades plus importantes constituées en terre gau- loise par le gouvernement romain.

Il faut distinguer, parmi les vici de Germanie, les anciens villages et les fondations nouvelles d’origine militaire. Ces dernières, de beaucoup les plus nom- breuses, doiventleur existence àla présence des légions ; ce sont les vici canabarum [canabae].

Dès le premier siècle de notre ère, des établissements civils se constituèrent, à proximité des camps militaires, tout le long du Rhin et du Danube ’ Des cabanes

beaucoup moins certaines r{ue ne l’avait pensé le premier édileur ; cf. P. Jouf^iiet, La vie municipale en Egypte, p. 353 sq. — 7 Bermea, XVI, p. 474, 475. — 8 Lt/s inscriptiona romaines de Hordeaux. Il, p. 121-123. — 9 Kornomann, Zur Stadl- enlatehung, p. 48. — ’0 Corp. inscr. Lat. XIII, 3, I, p. 407 et note 3. — Il Ibid. n. 6740a ; cf. p. 406. — li Ibid. n. 8095. — 13 Ibid. p. 214 sq. n. 6358, CSUS.

— 1» Ibid. p. 229, 230, n. 6417. 6i21. — 13 Ibid. p. 238, 231, n. 6454, 64s2.

— 16 Vicua U(lpius) : ibid. p. 422, n. 6433 ; Vicus Aurel{,im) ou Aureli^ianux. (Oehringen) : ibid. p. 197 et 270, n. 6341. — 17 Mommsen, Die rômiachen Lager- ttâdte dans /Termes, VII (IS73), p. 299-320 = Gesamme’.te Schriften. VI, p. 176- 203 : A. Scluillcn, Dis Territorium legio^ia, Hermès, XXIX (ISOi), p. 481-616.