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thène contre son tuteur montre que le grief principal du jeune orateur est qu’Apliobos n’avait pas épousé sa mère Cléoboulé, comme il aurait dû le faire. Parfois mémo le mari songe lui-même aux moyens de facilitera sa femme les moyens de se remarier et par testament il lui laisse les biens nécessaires à son établissement ; on a même soutenu que le maridécédépouvait, par testament, léguer sa femme à un autre’. Les donations entre vifs ont le même but et la loi de Gortyne autorise le mari à faire des libéralités à sa femme, à cause de mort, en limitant toutefois la somme à cent statères [donatio, p. 383J.

II. Rome. — Comme en Grèce, après un décès, les femmes surtout prennent part aux manifestations exté- rieures du deuil et suivent le cortège en pleurant, se lamentant ; elles se coupent les cheveux [funis, p. 1392]. Le deuil se porte en noir, plus rarement en blanc [p. 1391]. La durée en est ordinairement de dix mois pour la veuve, qui ne peut pas se remarier avant l’expiration de ce délai. Si la veuve, enceinte au moment du décès, accouche avant l’expiration des dix mois, son deuil peut prendre fin. Des sanctions pénales atteignaient le père qui avait rema- rié sa fille veuve avant l’achèvement du délai voulu, le citoyen qui avait pris femme dans ces conditions, la femme qui n’avait pas pris le deuil de son mari ou qui s’était remariée trop tôt [funus, p. 1 101- 1-402 ; i.ecatim, p. 1042 ; MATRiMOMiM, p. 1661]. Le deuil pour l’homme comptait peu d’obligations : il laissait croître sa barbe et ses cheveux en signe de chagrin [luctus, p. 1350 ; BARBA, p. 669 ; COMA, p. 1365]. .ucun délai ne lui était imposé et il pouvait se remarier dès qu’il le voulait.

Contrairement à ce qui se passait en Grèce, l’opinion publique n’était pas très favorable aux seconds mariages. Toutefois, en certaines circonstances, on dut favoriser ces mariages pour encourager la repopulation ; ainsi, par Vaes uxorium, qui était un impôt sur les céliba- taires, on pense que le dictateur Camille chercha à forcer les citoyens non mariés à épouser des veuves, dont le nombre avec les guerres était devenu consi- dérable [aes l’xorilmI. Les lois d’.uguste frappèrent de certaines déchéances la veuve qui ne se remariait pas dans un délai, fixé d’abord à un an, puis à deux ans [vacatio biennii)^. Les empereurs chrétiens suppri- mèrent ces déchéances et prirent des mesures pour sauvegarder les droits des enfants du premier lit [matri- MOML’M, p. 1661].

Suivant que la femme s’était mariée sous le régime in manu, qui la rendait totalement dépendante de son mari et de la famille de son mari, ou qu’elle était restée sui juris, sous la tutelle de sa propre famille, sa condition de veuve était différente. 1° Faisant partie intégrante de sa nouvelle famille, la femme est héritière naturelle de son mari ; elle participe au partage des biens au même titre que ses propres enfants ; elle passe sous la tutelle des agnats de son mari décédé, ou de ses enfants si elle a des fils majeurs |]maxis, p. 1386-1.387’. Toute- fois son mari peut, par testament, lui laisser la liberté de choisir elle-même son tuteur, oplicus lulor [titela, p. ooT]. La tutelle légitime des agnats fut d’ailleurs supprimée par la loi Claudia [le, p. 1133]. 2° Restant rattachée à sa propre famille, elle devient libre, à la mort de son mari, de retourner chez les siens et de faire valoir par son tuteur ses droits à la remise de sa dot [dos, p. 3961. Il arrive d’ailleurs que, par legs, IX.

le mari assure à la femme la restitution de sa dot [legatum, p. 1043], Le veuf, de son côté, doit restituer la dot de sa femme décédée ; il rend toujours la dot réceptice, mais si la restitution de la dot n’a pas été stipulée, il rend seulement la dot profectice (constituée par le père en personne ou par quelque ascendant paternel), et non la dot adventice (constituée par une personne autre que le père ou un ascendant paternel) ; il a même le droit de rétention sur la dot constituée par la voie ordinaire, s’il a des enfants issus de ce mariage, à fin de subvenir à leurs besoins et à leur éducation, au taux de 1/3 par enfant, ce qui absorbe la dot entière s’il y a cinc| enfants ou plus [dos, p. 396].

Souvent la restitution de la dot donnait lieu, on le comprend, à des difficultés et des contestations. Aussi, comme en Grèce, avec Vapolimhna, la loi romaine avait admis au temps d’Auguste une garantie donnée à la femme : elle jouissait du privilège de se faire payer avant les autres créanciers du défunt [iiypotiif.ca, p. 363]. Après le règne de Vespasien la veuve put se faire envoyer en possession des biens de son mari, pour sauvegarder avant tout la restitution de sa dot [jiissio, p. 1939]. Juslinien lui accorda une iiypothèque sur les biens dotaux et même une hypothèque privi- légiée sur les biens du mari On voit que la loi romaine, comme les mceurs, fut beaucoup plus attentive que la loi grecque aux droits de la femme. Justinien fit même une part spéciale sur l’héritage pour les veuves qui, épousées sans fortune, seraient restées sans moyens d’existence [heres, p. 130].

Le danger d’insuffisance des revenus pouvait aussi être prévenu, pendant la vie des conjoints, par des dona- tions entre vifs. Mais cette mesure fut toujours vue d’un mauvais œil par le législateur romain : elle encourageait la femme à prendre empire sur le mari et à solliciter des largesses en sa faveur ; les donations entre époux furent prohibées. On a vu que les Grecs limitaient aussi ce genre de libéralité qui s’exerçait au détriment de la famille légalement maîtresse des biens. Le moyen le plus usité pour subvenir aux besoins de la veuve était le legs d’usufruit. Sous l’Empire, on avait aussi recours à la donation à cause de mort. Le ji/s iibeî’orum, privi- lège créé pour favoriser les mariages et le nombre des enfants, comportait : d’après les /et/es decimariae [caduca- R1AE LEGES, p. 777], le droit de disposer par testament au profit de son conjoint, 1/10 en propriété, 1/3 en usu- fruit ; plus, s’il y avait des enfants issus d’un autre mariage, autant de dixièmes que d’enfants vivants ; la veuve avait en outre le droit de recueillir le legs de la dot [legatum, p. 1043]. La loi fut abrogée par Théodose le jeune, qui rendit aux époux la capa- cité de disposer, à cause de mort, au profit l’un de l’autre [jus liberûruii, p. 1197 et 1198, note 13 ; dona- rio, p. 384].

.ux premiers siècles de Rome, la veuve riche était, comme la femme non mariée, exclue du cens, mais elle devait comme propriétaire une redevance à l’État et elle contribuait sur ses biens à l’entretien des chevaux de guerre [aes uordearium]. E- Pottier.

VIDUVIUM. — 1 Lallicr, De la condition de In femme dans ta famille ^IM- nienne, Paris, 1875, p. IS et p. îli ; P. Gido, Élude sur la condition privée de la femme, Paris, 1867, p. 82. — 2 Ulpian. /leg- XiV.

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