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agricoles ontperdu leur force’ ; l’essentiel est dcA-enu l’ac- cessoire, et les priora que peint Ovide semblent n’avoir plus attiré, par le nom de Vénus, que la foule des courti- sanes-. Plus tôt, néanmoins, cette fête avait sùremeni ac- quis dans Rome, non seulement la signification, mais l’im- portance que possédaient aux v’ et iv" siècles av. J.-C, à Alliènes,les/^/7Ao/5>(«desÂnthestéries[DiONYSiA,p. 233].

Pareille décadence atteignit les Vinalia nisticu’^, qui au temps de Varron n’intéressent plus que les maraî- chers * ; elle explique l’embarras où nous sommes d’en retrouver le vrai sens et l’objet principal. Jusqu’à pré- sent, trois interprétations en ont été proposées par les modernes à la suite des anciens.

1» Pour M. Wissowa», comme pour Varron, les Vinalia rustica avaient pour but d’écarter les intempéries, par- ticulièrement redoutables dans la période finale de la maturation des raisins^ : hune diem feslutn tetnpesla- tibus leniendis institutum. Mais cette explication est formellement rejetée par Pline dans le passage même où il la cite. Varron ne l’a fondée quesur une observation inexacte : il a cru que le 19 août, au matin, marquait le coucher de la constellation de la Lyre, et, par suite, le début de l’automne. Or l’on sait que la Lyre se couche dès le 8 août", et l’origine des Vinalia rustica doit, par conséquent, être cherchée en dehors de ces causes pro- phylactiques auxquelles Pline lui-même les avait, quel- ques paragraplies plus haut, docilement rapportés d’après des sources moins sûres’ : exti^a lias causas sunt Vinalia altéra ({uae agnntur a. d. XIV Kal. Sept. ’°.

2°Mommsen, relevant dans l’abrégé de Paul Diacre une glose que le ms. napolitain du texte plus développé de Festus avait laissée tomber, admet, d’après elle, que les Vinalia rustica étaient célébrés dans la Ville le premier jour où il était permis d’y faire entrer le vin nouveau". Mais comme la vendange ne commençait guère qu’un mois plus tard’^, Mommsen est obligé de supposer que le vin ne pénétrait dans Rome que onze mois après sa fabrication ". Cette conjecture soulève des objections graves. Elle ajourne, sans preuves, l’institution des Vinalia rustica à l’époque tardive où les liomains, déjà raffinés, ne voulaient boire que du vin vieux d’au moins un an. Elle conduit, soit à leur sacrifier les Vina- lia priora, soit à maintenir au calendrier deux fois la

l Cf. supra Jullian, an. fefias, 11,1049, A,u.7. — ÎQv. , Fast.Uo : Xmnina ntl- gares Veneris celebrate puellae, etc. — 3 Cf. supra, Jullian, ibid. 1049, B, n. 16.

— * Varr. L. l. VI, 20 ; tum sunt feriaii oUtores ; cf. Fesliis, p. 289 M. : jumen- ta que et oUtores ab opère cessant]. — 5 Op. cit. p. 115. — 6 Verg, Georg. II, 419 : et jam maturis metuendus Jupiter uvis. — ’ Plin. Nat. hist. XVIII, 289.

— 8 Plin. ibid. : Varro ea fidicula incipiente occidere mane déterminât, quod vult initium autumni esse et hune diem Césium tempestatibus leniendis institu- tum. Nunc fidiculam occidere a. d. VI id.Aug. servatur. Sur ces différences de calculs Pline esl revenu ailleurs : /// idus fiilicula occasu suo atitumnum inclioat, uti is adnotttt sed vera ratio id fieri invenil VI idus easdein (.XVIII, 271). Or le lemps dangereux pour les Tignes prend lin avec le coucher de la Lyre. Une fôle prophylactique serait déplacée onze jours après ; cf. Plin. XVIII, 270 cl surtout 272 : in hoc temporis intervalto ;la canicule, qui va du 23" jour après le solstice au coucher de la l.yre" rei summa vilium agitur. — ’J Plin. XVIII, 2S4 : (ria namque tempora fruclibus metuebant, propter quod institucrunt ferius diesque fcstos Robigalia, Floralia, Vinalia. Je partage l’opinion de H. Fowlcr (dp. cit. p. 87, n. 8) qu’il s’agit ici des ’i«o(ia rustica, non seulement à cause de l’ordre suivi par Pline dans l’énum^ratiou des trois fêtes, mais à cause de la restric- tion du § 287 : Vinalia priora ... nihil ad fructus attineni. Entre 284 et 2S’J la contradiction, d’ailleurs, n’est qu’apparente. Au § 284 Pline reproduit la théorie de ses sources, sans les nommer, mais en portant sur elles un Jugeiueut à demi bienveillant : rudis fuit priseorum vila ... ; non minus ... ingeniosam fuisse in illis observalionem apparebit qnam nunc esse ralionem. Au § 289, il nomme l’une de SCS sources, cl, sans doute d’après d’autres qu’il ne nomme pas, en réfute la théorie. Ue leur désaccord il apperl tout au plus que le vrai sr-ns des rustica était déjà perdu pour nombre d’entre elles et c’est à aous à prendre parti eu dehors

même fête. Elle entraîne nécessairement cette consé- quence, inadmissible en soi, qu’il n’y eut plus à Rome, à partir du jour où la célébration des Vinalia rustica devint obligatoire, un seul viticulteur possédant une vigne hors des murs et des celliers à l’intérieur des murs. Aussi la théorie de Mommsen n’a guère fait d’adeptes" et c’est justice.

SoScheiffele ’°, Preller ’% Marquardt ", Warde Fowler ", Usener" — à l’opinion desquels je me range — ont pré- féré rapporter aux Vinalia rustica Vauspicaiio vin- rfemme effectuée à Rome parle flamen dialis, et ailleurs par les prêtres locaux, telle que Varron l’a décrite comme l’offrande à Jupiter, en un sacrifice solennel, des prémices du raisin et du vin nouveaux^". Avant l’ac- complissement de ce rite, nul ne pouvait apporter de vin dans la ville ^’. Les Vinalia rustica qui l’impliquent équivalent ainsi à l’ouverture religieuse de vendanges que suivait aussitôt--, sous l’Empire, d’après la marclie de la saison dans ses différentes provinces et sur déci- sion de leurs gouverneurs, toute la série des ouver- tures administratives ^^

Contre cette conception rationnelle des choses, s’élève, il est vrai, une objection grave, tirée de l’écart qui sépare le 19 août, jour des Vinalia l’ustica., de la date à laquelle commençaient les vendanges en Italie. Mais d’abord, en admettant que « vindemiam antiqui niun- quam existimavere maturani anteaequinoctium » ^’, il n’en subsiste pas moins que les contemporains de Pline étaient plus pressés’" et que l’intervalle réel entre les Vinalia rustica et le début qu’assigne à la période des fcriae vindetniales une glose du Code Théodosien n’est, en tout, que de quatre jours ". Ensuite, et surtout, la mythologie comparée nous enseigne que les prémices aux dieux ont toujours devancé d’assez loin la récolte des hommes. Dans la religion romaine, les Vestales devaient couper les premiers épis de blés, dont le grain était destiné à la confection des galettes sacrées, plu- sieurs semaines avant la moisson [vestalia] ’■^■’. Aujour- d’hui, les indigènes des îles Tonga offrent aux dieux, dont ils veulent obtenir la bénédiction sur tous les fruits de la terre, le produit qui leur en parait le plus précieux, l’igname, juste avant que la récolte entière soit bonne à cueillir-’. Par une pratique analogue, et de

d’elles. — id Plin. XVIII, 2S9. — " l’aul. p. 204 M. : rustica Vinalia. ’IV Kulendas Septembris celebrabant, quo die primum t’i'iium Urbem deferebanl.

— ’^Cl.infra, n. 24 s<|. — ’3 Mommsen, Corp. inscr, lat. 12, p. 320. —1» Adhé- sion restreinle chez Fowler, qui reconnaît quelque valeur au raisonnement do Mommsen p. cit. p. 103), mais adopte d’autres conclusions (p. 104). Dénéga- tion formelle chez Wissowa, Op. cit. p. 113, n. 5. — ’5 Pauly, Op.l. VI, 2, p. 201 i.

— 16 I, 196, — n Le CuUe,n, p. 17. — 18P. 104. — ’3 Usener, Der lleiligetychon, Leipzig-Berlin, 1907, p. 44-45, — 20 Varr. L. l. VI, 16 : aliquot vindcmiae primum ab sacerdotibus publiée fiebant, ut Romae etiam nunc : nam flamen dialis aus- picatur vindemiam et, ut iussit vinum légère, agna Jovi facit, inter cnus exta cnesa et proiecta flamen porus (prius Ellis ; primus, Mueller ; praecinctus, Usener) vinum legit. — 2’ Varr. ibid. : vinum novum ne vehatur in Urbem unie- quam Vinalia calenlur ; coutume en relation avec un veto, dont il y a de nombreux exemples chez les non civilisés d’aujourd’hui ; ils punissent de mort la moindre infraction àces^atouslcf. Frazer,ie,ftameai( d’or, II, p. 8.5 sq.) ; c’est p.ir analogie que j’explique la glose de Paul, p, 204 M, citée supra, p, 893, n. 8. —22 Cf. infra, n, ÎO.

— 23 Dig. II, 12, 4 : Paulus libro primo ad edictum : Praesides provinciarum ex consuetudine cuiusque loci soient rnessis vindemiarumque causa tempus statuere...

— 2lpIin,A’a(, hist. XVIII, 315. — 2^ Plin. ibid. : iam passimrapi cerno. Je crois donc qu’il ne faut pas tenir trop grand compte du précepte de Pline, ibid. 319 : iuatum vindemiae tempus ab aequinor.tio ad vergiliarum occasum dies XLIV. Pline, d’ailleurs, quelques lignes plus bas, cite le cas de viticulteurs qui, faute de dolia en quantité suffisante, ne terminent leur vindemia qu’en janvier.

— se Cod. Theod. II, 8, 19 : a -Y autcm kal. Sept, usque in idus Octobr. vindemiales feriae concedantur. - ’21 Fowler, Op. cit. p. 205 et 110. _ 28 Frazer, Golden Uough, 11, p. 379. Cité par Fowler, Op. cil. p. 206