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le i)his simplement’. L. de Ronchaud^a vu, un peu audacieusemonl, dans les vers où Euripide^ nous pré- sente Ion dressant sa tente à Delphes, une description de la décoration intérieure du Parlhénon. Du moins il s’agit évidemment de celle d’un édifice sacré. Le jeune homme puise dans les trésors, où l’on conservait les tissus de prix, avec broderies à sujets variés, pour les en faire sortir dans les grandes solennités ; il en atta- che au toit, en dispose sur les murs (peut-être simple- ment dans les colonnades intérieures) et enfin à l’entrée. Ces voiles, dans les temples, n’avaient pas une destina- lion uniquement ornementale ; des préoccupations reli- gieuses en dictaient aussi l’emploi. On dérobait aux profanes, à Jérusalem, la vue du Saint des Saints ’, et Pausanias mentionne des voiles suspendus devant les statues de culte [aulaea]. L’Aphrodite de Cnide se plai- sait seule au grand jour ; sa cella était ouverte de tous côtés ^ ; mais d’habitude des rideaux mobiles mainte- naient ces images au secret : dans le temple de Vesta, à Home, le réduit intérieur était tegetibus saeplus ; on voit, dans la fable d’Apulée, les serviteurs du sanctuaire d’Isis écartant les blancs rideaux qui caclienl l’idole, rideaux disposés comme ceux de nos fenêtres ’.

. partir de l’époque hellénistique, et surtout de l’épo- que romaine, les témoignages abondent touchant l’usage des cela. Ils fournissaient un moyen très conmiode de se dissimuler ; derrière eux, on entendait sans être vu. Alexandre fut de la sorte témoin de la torture qu’il (it donner à Philotas’ et épia ainsi bien des conversa- tions’. Agrippine suivait, cachée par une tapisserie, les séances du Sénat’" ; la femme de Pline le Jeune faisait de même pendant les recitalioties, quand son mari lisait à un cercle d’amis quelqu’un de ses ouvra- ges". Après le meurtre de Caligula, Claude fui décou- vert, tout apeuré, derrière un rideau de porte, par le soldat qui le proclama empereur ’-. Dans l’intérieur des maisons, on se gardait par des rideaux contre la lumière trop vive ou la curiosité ; on en posait devant les fenê- tres, comme de notre temps". Us étaient particulière- ment nombreux, ainsi qu’on devine, dans les maisons suspectes oii la jeunesse s’égarait". Ciiez les gens vivant très simplement, on voyait loul au moins des élolTes grossières, Cilicum cela foribus appensa ’ et les cenue sine aulaeis ’° étaient l’indice d’une très médiocre situation.

Les monarchies de Syrie et d’Asie Mineure, régnant sur des populations aussi orientales que grecques, avaient beaucoup développé la vogue des tapisseries luxueuses" : on avait adopté l’expression, qui se per- pétua, d’aiilaeae Aetalicae ’* pour les tissus de soie aux riches broderies. Du parti que la maison grecque de ce temps lirait des élofTes, nous n’avons aucun aperçu par les fouilles ; mais les témoignages indirects four-

i l’our les Iciilures des portirpies romains, Propert. Il, 32, li. — 2 £a Tapisserie dans Cantiqaité, fin. — 3 Ion, ll3i-ilC5. — i Paralip. Il, 3, 14 ; ExO’l. î6-i’i : ,ttm. IV, âS. Les leutures à cel elTet prODatciil souvent le nom de conri.^AE, r|iji, lui aussi, est très vague ; cf. Seliol. Hor. A’a/. Il, 8, 54 : aulaea, cortina vel vêla. l-ausseéUmologie dans Isid. Hisp. Orig. XIX, iC, 9 (a coriis). — 5 l’Un. .Vrt(. Iiist. XXWI, il. — 6 l’eslus, ». V. Penus. — ■ Metain. XI, ÎO : relis redactis m diccrsum. Cf. t’Iin. Ep. Il, 17, 20 : vêtis ob’lurtis redactisque (iodi’|ue les deux opéralionsl. — 8 Tint. Alex. 49, 4. — 9 IJ. Cuit. VIII, 3, il. — ’0 Tac. Ann. XIII, 5. — " Epist. IV, 19, 3. — 12 Suet. C/aiid. 10, I. — 13 Juv. IX, 104-IO.t : Cla-jde feneslras, vêla tegant rimas : Hin. Epist. VII, 21, 2 : Cubicula oliductis relis opaca nec tamen obscnra facio ; Ovid. Ars am. 111, 807 : A*ec lucem in tlia- lamos lotis admille fenesiris. — 1» Petron. Sat. 7 ; Uarlial. I, 34, 5 ; XI, 4). — li Sid. Apoll. IV, 24, 3. — 10 Hor. Od. III, 29, 13. — r l’our orner le Icniplc

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millent : dans les très nombreux bas-reliefs hellénisti- ques parvenus jusqu’à nous, on voit fréquemment une draperie constituant le fond du tableau ; convention par laquelle le sculpteur donne à comprendre que la scène se passe dans un appartement ’^ Lorsqu’il veut repré- sentera la suite plusieurs épisodes d’une seule histoire, il distingue de même les scènes d’intérieur et celles qui ont lieu au dehors. Dans V A polhéose d’ Homère [^. 5200), Archélaos de Priène a mis au dernier plan du registre inférieur une longue tenture appliquée contre une colonnade : le poète est ainsi déifié dans un temple ; les autres épisodes ont pour théâtre les flancs rocheux du Parnasse. 11 est donc certain que les parois étaient sou- vent recouvertes de tapisseries’-". Il est clair aussi qu’on en étendait en travers des pièces, de façon à pouvoir sectionner celles-ci à volonté ^’ : de deux on en faisait une aux jours de grande réception. Dans la salle à manger de Calon d’Utique, la décoration en élofTes avait coûté 800000 sesterces ; elles passèrent ensuite à Néron pour une somme de quatre millions -^ Semper pensait que les draperies de cloisonnement ne montaient pas jusqu’au plafond, mais seulement assez haut pour for- mer des divisions sans nuire à l’elTet général et à la perspective intérieure. C’est oublier que l’effet eût été ainsi probablement moins heureux, excepté dans les habitations de grande hauteur, qui devaient être assez peu nombreuses. Ce sont, ou des rideaux de portes, ou des lenlures murales’", ces inclusae auro vestes ornant le vestibule-’, également décoré à fresque, d’un riche Piomain, sur lesquelles s’extasient les clients, dans leur visite matinale.

Les ruines campaniennes nous procurent quelques données plus explicites. lion nombre de pièces ouvrant sur l’atrium devaienlêtre fermées pardespiècesd’étofl’es. Dans une maison d’IIerculanum, conservée sous la lave, et dont le relevé complet put être fait avant sa destruc- tion, on a retrouvé encore en place les tringles et les anneaux qui avaient servi à suspendre ces rideaux-’. A Pompéi, autres observations : on constate que le com- plurium pouvait être fermé par un vélum ; les cordons qui permeltaient de le déployer ou de le retirer étaient atlacliés à des anneaux de bronze, un à chaque colonne d’angle de l’atrium ■^. De même, l’ouverture du taùli- num n’était jamais close par une porte, mais unique- ment par une portière : c’est ce que font voir les cram- pons, destinés à la fixer, qui sont revenus au jour dans la maison de Vesonius Primus ^ Dans deux maisons on a Irouvé les embrasses de métal sur lesquelles elle repo- sait, quand on l’avait relevée de chaque côté. Dans celle dite « des noces d’argent », une embrasse de ce genre était fixée à chacun des deux pilastres d’entrée du tabli- num, non pas en son milieu, où on serait en droit d’y voir un simple ornement, mais tout près de l’entrée.

de Jérusniem, Judas Maccliabi’e isi.jtr.Ti... -../ i !!j-. ::eTi»|../-’/. -".v Bu ;™. (Jos. Anl. urf. XII, 318). — 18 Properl. Il, 32, 12 ; Val. Mai. IX, I, 3 ; Cic. l’en. Il, iv, 12, 27. _ 19 Cf. Duruy. Uist. des Hom. V, p. 2(17 et 401 (reliefs du Louvre) ; ajoulcz la réception de Diouisos chez Icarios (noire fig. IC !I6) ; liistoire figurée de la vie d’un enfant, sur son sarcophage (fig, 2011) ; repris (fig. 1702) ; scène de sarcophage (Uoschcr, Lexikon, III, 2, p. 3171) ; v. encore S. lieinach, Ilépert. de reliefs. II, p. 203, 1 ; III, p. 421 CD. —20 Sencc. Qiiaest. nat. IV6, 13, 7 : //uamris cenationem vêtis ac specularibus munianl. — 21 Clitos fut lue d’un coup de lance, comme il soulevait une tapisserie pour entrer dans la salle où soupait Alexandre (Plut, -We.r. 51, 3).— 22 plin.jVa(. /»•«(. VIII, I9(i. — «3 Virg. (Jeorij. Il, 404. — 2V Cf. Juv, VI, 227 : Ornatas paiito ante fores, penùentia linquit rein domns. — 23 Cf. liicli. DicUonn. s. v. IJomus. — 26 A. Mau, Pompeji^, l.t-ijr/.. l’JOS, p. 317. — 27 Eni. l’resului, Pumpeji, l.cipz. 18S2, AM. III, p. 3.

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