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Ses fleurs naissent au sommet, larges, grandes comme celles du pavot cultivé, composées chacune de quatre pétales, disposées en rose, de couleur jaune doré.

Lorsque cette fleur est passée, il paroît un fruit en silique, long comme le petit doigt, grêle, rude au toucher, contenant des semences arrondies & noires.

Toute la plante est empreinte d’un suc jaune & teinte en jaune ; elle est en même tems de mauvaise odeur, d’un goût amer, & croit aux lieux maritimes sablonneux.

J’ai en mes raisons pour décrire cette plante, qui pourroit devenir fatale à ceux qui ne la connoîtroient pas, & qui du-moins l’a déja été en Angleterre. On en cite un exemple dans les Trans. phitos. n°. 242, & le récit en est assez singulier pour mériter d’être extrait.

Dans une maison de laboureurs de la province de Cornouailles, on mit par erreur de la racine de cette plante, au lieu de celle du panicaut de mer, dont les pauvres gens du pays sont communément des especes de fouasses, ou de gâteaux. Dès que le maître de la maison eut mangé de celui-ci tout chaud, il fut saisi d’un violent délire, dans lequel tous les objets lui paroissoient jaunes ; en sorte qu’il prenoit les ustensiles de la maison pour être autant d’ustensiles d’or. Son valet & la servante qui mangerent après lui du même gâteau, eprouverent aussi les mêmes symptomes ; saisis d’un délire d’ivresse qui leur ôta la raison, ils se deshabillerent, entrerent tout nuds dans une chambre ou beaucoup de monde se trouvoit, & se mirent à danser dans cet attirail de la simple nature.

Un enfant au berceau à qui l’on avoit donné un petit morceau du gâteau de pavot cornu, en éprouva de legeres convulsions avec assoupissement ; mais il se rétablit au bout de peu de jours. La nature guérit aussi les autres malades par un grand cours de ventre qui succéda promptement, & accompagne de violentes tranchées. Leur folie étoit telle dans le commencement de ce bénéfice naturel, qu’ils s’imaginoient que leur garderobe étoit de l’or le plus pur. Il semble que ce délire singulier provenoit sur-tout de l’idée qu’ils avoient dans le cerveau de cette plante, dont les racines les avoient empoisonnés. J’ai déja dit en la décrivant, que ses fleurs sont grandes, en rose, d’un beau jaune, que tout le suc de ce pavot est jaune, & qu’il teint en jaune. (D. J.)

PAUPIERE, s. f. (Anatomie.) les paupieres sont une espece de voiles ou rideaux placés transversalement au-dessus & au-dessous de la convexité antérieure du globe de l’œil. Il y a deux paupieres à chaque œil, une supérieure & une inférieure. La paupiere supérieure est la plus grande & la plus mobile dans l’homme. La paupiere inférieure est la plus petite, & la moins mobile des deux. Les deux paupieres de chaque œil s’unissent sur les deux côtés du globe. On donne aux endroits de leur union le nom d’angles, & on appelle angle interne, ou grand angle, celui qui est du côté du nez ; & angle externe, ou petit angle, celui qui est du côté des tempes.

Les paupieres sont composées de parties communes & de parties propres ; les parties communes sont la peau, l’épiderme, la membrane cellulaire ou adipeuse. Les parties propres sont les muscles, les tarses, les cils, les points ou trous ciliaires, les points ou trous lacrymaux, la caroncule lacrymale, la membrane conjonctive, la glande lacrymale, & enfin les ligamens particuliers qui soutiennent les tarses. De toutes ces parties des paupieres, les tarses & leurs ligamens en sont comme la base. Voyez Tarses, ligamens ciliaires, &c.

Les bords de chaque paupiere en leur entier, sont

formés par le bord du tarse, & la rencontre de la membrane interne avec la peau de l’épiderme. Ce bord a une petite largeur plate, depuis deux ou trois lignes de distance de l’angle interne des paupieres, jusqu’à l’angle externe, vers lequel la largeur va en diminuant. Cette largeur qui n’est que l’épaisseur applatie des paupieres, est taillée obliquement, de sorte que quand les deux paupieres se touchent légerement, elles forment avec la surface du globe de l’œil, un canal triangulaire.

Le bord applati de chaque paupiere est garni d’une rangée de poils qu’on appelle cils ; ceux de la paupiere supérieure sont courbés en haut, & plus longs que ceux de la paupiere inférieure qui sont courbés en bas. Les rangées sont du côté de la peau ; elles ne sont pas simples, mais plus ou moins inégalement doubles & triples. Les poils sont proportionnément plus longs vers le milieu des paupieres, que vers les extrémités, & il ne s’en trouve point ordinairement à la distance marquée de l’angle interne.

Le long du même bord des paupieres, vers la membrane interne, ou du côte de l’œil, paroît une rangée de petits trous, qu’on peut appeller trous ou points ciliaites.

On compte ordinairement deux muscles aux paupieres ; un propre ou particulier à la paupiere supérieure, nommé muscle releveur de cette paupiere ; & un commun aux deux paupieres, appellé muscle orbiculaire des paupieres, lequel on subdivise différemment. Voyez Orbiculaire, & Releveur

La paupiere supérieure dans l’homme a beaucoup plus de mouvement que la paupiere inférieure. Les petits clignotemens simples qui arrivent de moment en moment, dans les uns plus, dans les autres moins, se sont à la paupiere supérieure alternativement par le releveur propre, & par la portion palpébrale supérieure du muscle orbiculaire. Ils se font aussi alternativement & en même tems à la paupiere inférieure du muscle orbiculaire, mais très-peu à cause du petit nombre des fibres palpébrales inférieures.

Ces mouvemens légers, sur-tout celui de la paupiere supérieure, ne sont pas si faciles à expliquer, conformément à la vraie structure. Les mouvemens qui font tout-à-fait froncer les paupieres, & qu’on fait ordinairement pour tenir un œil bien fermé, pendant qu’on regarde fixement avec l’autre, peuvent être assez clairement expliqués par la simple contraction de toutes les portions du muscle orbiculaire. Ces derniers mouvemens sont aussi abaisser les sourcils, de sorte qu’on peut les mouvoir en trois différentes manieres ; savoir en haut par les muscles frontaux, on bas par les muscles orbiculaires, & en devant par les muscles sourcilliers.

La peau des paupieres est plus longue chez les Orientaux que chez les autres peuples ; & cette peau est comme on sait d’une substance semblable à celle du prépuce ; mais quel rapport y a-t-il entre l’accroissement de ces deux parties si éloignées.

Les paupieres, dit Ciceron, qui sont les ouvertures des yeux, ont une surface douce & polie, pour ne les point blesser ; soit que la peur de quelque accident oblige à les fermer ; soit qu’on veuille les ouvrir. Les paupieres sont faites pour s’y prêter, & l’un & l’autre de ces mouvemens ne leur coûte qu’un instant. Elles sont, pour ainsi dire, fortifiées d’une palissade de poils, qui leur sert à repousser ce qui viendroit attaquer les yeux quand ils sont ouverts, & à les clôre dans le tems du sommeil paisible.

Pour mettre dans un plus grand jour l’usage de ce beau voile, je remarquerai trois choses. 1°. Que les paupieres consistent en une peau mince & flexible, mais forte, par où elles sont plus propres à nettoyer & à défendre en même tems la cornée. 2°. Leurs bords sont fortifiés par un cartilage mol & flexible ;