Page:Diderot - Encyclopedie 1ere edition tome 15.djvu/649

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

des trois ligues grises & de la comté de Neuchatel. Ils composent tous le louable corps helvétique, & jouissent tous en France des mêmes privileges sans aucune distinction.

L’entrée des toiles étrangeres n’est permise dans le royaume que par les villes de Rouen & de Lyon, en prenant pour cette derniere des acquits à caution aux bureaux de Gax ou de Coulonge, suivant un arrêt du 22 Mars 1692. Mais, en faveur des Suisses seulement, le bureau de Saint-Jean-de Losne est ouvert comme les deux autres, par un arrêt de 1698.

La position du territoire des Suisses & de celui de leurs alliés, ne leur permet pas de faire entrer leurs toiles par Rouen ; ainsi ce n’est qu’à Lyon qu’ils exercent leurs droits, après avoir rempli néanmoins certaines formalités.

Ils sont obligés de faire inscrire leurs noms & enregistrer leurs marques au bureau de la douane. Chaque particulier n’y est admis qu’après avoir constaté son origine devant le président en la jurisdiction de la douane, par des certificats authentiques des magistrats des lieux de sa naissance. La vérité de ces certificats doit être attestée avec serment par deux négocians suisses déja inscrits. Ensuite le procureur du roi & le directeur de la douane sont entendus ; & enfin lorsque rien ne s’y oppose, on expédie des lettres d’inscription, dans lesquelles il est défendu au nouvel inscrit de prêter son nom & sa marque, à peine d’être déchu de son privilege.

Il n’y a que ceux des marchands suisses qui ont rempli ces formalités, qui puissent faire entrer leurs toiles à Lyon sans payer des droits. On exige même que les balles de toiles portent l’empreinte de la marque inscrite (qui par conséquent a été envoyée à un correspondant), & qu’elles soient accompagnées des certificats des lieux d’où elles viennent, portant que ces toiles sont du cru & de la fabrique du pays des Suisses, conformément aux arrêts de 1692 & 1698.

Il semble que de la teneur de ces deux arrêts, les Suisses pourroient inférer que leurs basins doivent être exempts de droits d’entrée comme leurs toiles. Mais il est constant que leurs basins payent les droits ordinaires ; peut-être est-ce parce que tout privilege est de droit étroit, & que les basins ne sont point nommés dans ces privileges, ou bien parce que le coton dont ces basins sont en partie composés, empêche que l’on ne puisse les regarder comme marchandises du cru du pays des Suisses.

Par une concession de François I. en l’année 1515, qui est motivée pour services rendus, & entr’autres prêt d’argent, les marchands des villes impériales avoient obtenu quinze jours de délai, au-delà des quinze jours suivant immédiatement chaque foire, pendant lesquels, conformément aux édits de Charles VII. & de Louis XI. les marchandises ne payent à la sortie de Lyon aucun des droits dûs dans les autres tems. Les Suisses qui n’avoient que dix jours de grace, en demanderent quinze comme les Allemands, ce qui leur fut accordé par Henri II. le 8 Mars 1551. Pour jouir de cette faveur, ils doivent se faire inscrire à l’hôtel-de-ville comme ils le sont à la douane pour l’affranchissement des droits d’entrée. La raison en est que ces droits de sortie, qui sont domaniaux, ont été aliénés à la ville de Lyon en 1630.

Voyez sur tout cet objet les différentes histoires des Suisses, ou au moins le recueil de leurs privileges, imprimé chez Saugrain en 1715 ; le mémoire de M. d’Herbigny, intendant de Lyon ; dans l’état de la France, par le comte de Boulainvilliers ; & le recueil des tarifs, imprimé à Rouen en 1758.

Il peut être important d’ajouter ici que les toiles de Suisse, que l’on envoie de France aux îles & co-

lonies françoises, sont assujetties, par l’article 14. du

réglement du mois d’Avril 1717, concernant le commerce de nos colonies, aux différens droits dûs à la sortie & dans l’intérieur du royaume d’une province à l’autre. Voyez Provinces réputées étrangeres.

L’article 3. du même réglement, a exempté de tous ces droits, dans le cas de l’envoi aux colonies, les marchandises & les denrées du cru & de la fabrique de France. Mais comme les toiles de Suisse une fois sorties de leurs ballots, n’ont plus rien qui les caractérise, il paroît qu’il seroit aisé de les envoyer à-travers tout le royaume de Lyon à la Rochelle, pour passer à nos colonies comme toiles françoises.

Afin de prévenir tout abus à cet égard, on pourroit exiger que les toiles de Suisse reçussent dans leur pays, ou lors de l’ouverture des balles en France, une marque particuliere & distinctive. Cette idée s’est présentée si naturellement, que j’ai cru devoir l’ajouter à cet article avant de le terminer. Article de M. Brisson, inspecteur des manufactures, & académicien de Ville-Franche en Beaujollois.

SUITE, s. f. (Gram.) enchaînement, liaison, dépendance, qui détermine un ordre successif entre plusieurs choses. On dit les suites d’une affaire ; la suite de la débauche ; la suite d’un raisonnement ; la suite d’un prince ; c’est à la suite d’une affaire ; une suite d’événemens fâcheux ; une suite de sottises ; la suite de l’histoire ecclésiastique ; une suite de médailles de poëtes.

Suite, en Algebre, est la même chose que serie. Voyez Serie.

Suite, (Jurisprud.) signifie la continuation ou la poursuite d’une chose.

Suivre le barreau, c’est le fréquenter, y assister.

Etre à la suite de la cour ou du conseil, c’est se tenir auprès & à ses ordres.

Faire suite d’une demande ou procédure, c’est continuer les poursuites commencées.

Suites de bêtes, dans la coutume de Berry & autres coutumes, c’est proprement une revendication que fait celui qui a donné du bétail à cheptel, lorsqu’il est vendu à son insçu par le preneur.

Suite se prend quelquefois pour le croît du bétail. On dit croît & suite ; la coutume de Touraine, article 100, dit que ceux qui ont droit de faultrage & préage, avec faculté de mettre dans les prés dont ils jouissent des vaches & bêtes chevalines avec leur suite, n’y peuvent mettre que le croît & suite de l’année seulement, c’est-à-dire, les veaux & poulins de l’année.

Suite de dixme, ou dixme de suite. Voyez Dixme.

Suite par hypotheque, est lorsqu’en vertu de l’hypotheque on poursuit le détenteur d’un bien qui est hypothéqué à une créance. On dit communément que les meubles n’ont pas de suite par hypotheque, c’est-à-dire, que quand ils sont déplacés du lieu où on les avoit donnés en nantissement, on ne les peut pas saisir entre les mains d’un tiers, si ce n’est en cas de banqueroute ou par droit de revendication. Voyez l’article 270 de la coutume de Paris.

Suite de personnes serves, c’est la revendication que peut faire le seigneur de ses hommes serfs, lorsque sans son consentement ils vont demeurer hors de sa seigneurie. Voyez les coutumes de Berry, Nivernois, Bourbonnois, Bourgogne, Comté.

Droit de suite du châtelet de Paris, est un droit particulier, en vertu duquel lorsqu’un commissaire du châtelet de Paris a apposé le scellé, il doit être par lui apposé par droit de suite dans tous les lieux où il peut se trouver des effets du défunt, & l’inventaire doit être fait de même par les notaires du châtelet, ou par ceux des lieux auxquels les officiers du châtelet délivrent des commissions à cet effet.